Plaisir

Quel est votre fantasme sexuel ?


Quelle image vous trouble le plus ? La sexualité est un théâtre, dans lequel nous pouvons expérimenter des rôles qui ne nous sont pas habituels. Découvrez le scénario qui excite votre inconscient.
 Le fantasme appartient à un univers étrange autour duquel nous ne cessons de tourner, entre attirance et répulsion. L’attirance pour cette  « zone érogène psychique », selon les mots du psychiatre et psychothérapeute Willy Pasini (InLes Nouveaux Comportements sexuels (Odile Jacob, “Poches”, 2010)). Et la répulsion pour ce qui naît de notre inconscient le plus profond et, vraisemblablement, le plus sombre.
« L’origine du fantasme est le fantasme des origines », assuraient les psychanalystes J.-B. Pontalis et Jean Laplanche en un résumé éclairant (In Fantasme originaire, Fantasme des origines, Origines du fantasme (Hachette Littératures, “Pluriel”) : c’est dans ce que, enfant, nous avons entendu, pressenti de ce qui se passait dans la chambre parentale, de ce que nous avons  imaginé de cet acte qui fut à l’origine de notre venue  au monde que se construisent nos fantasmes.  La sexualité est donc, par essence, le lieu où nous  pouvons approcher ce monde des profondeurs en nous.
« C’est un théâtre, un espace de jeu dans lequel  nous expérimentons des rôles et des polarités qui ne nous sont pas habituels », confirme Alain Héril. Elle  peut ainsi représenter un espace de liberté, voire de réparation. À condition de comprendre que l’important n’est pas de réaliser nos fantasmes mais, en les vivant partiellement, en les abordant, d’en nourrir notre désir. Car, précise le sexothérapeute et psychanalyste, « en voulant les accomplir, nous risquons de nous confronter à un réel intolérable, à des forces inconscientes qui nous dépassent ».  
À travers ce test, nous avons cherché à vous démontrer  que, consciemment ou pas, vos fantasmes irriguent déjà votre vie sexuelle. Qu’ils attisent vos appétits. Qu’ils nourrissent votre imagination. Repérer celui qui domine chez vous, vous interroger, vous permettra de mieux en jouer, sans leur ôter complètement leur part de mystère. N’oubliez pas : c’est là que réside le désir.

Image 1 : Vous aimeriez dominer

Le fantasme de domination peut faire peur, car il met en scène la cruauté, la violence et, dans ses excès, la perversion. Mais vous pouvez en trouver des traces dans votre vie sexuelle quand vous savez convaincre un partenaire un peu tiède, apprécier les positions où vous menez le jeu, éventuellement maintenir ses mains. À la différence de la perversion pathologique, dans laquelle l’autre est nié, réduit au rang d’objet au service de nos fantasmes, la petite note dominante est une mise en scène qui n’oublie pas le partenaire et son plaisir.
Vous vous amusez à le contrôler, à lui imposer votre tempo et à titiller les limites de sa jouissance ? C’est un moyen de tester votre puissance, votre force vitale. Les hommes aiment y conforter leur vigueur. Mais les femmes aussi peuvent y explorer leur yang. Car rien n’est figé, nous passons souvent d’un rôle à l’autre, chevauchant puis nous laissant dominer à notre tour.
La question à vous poser : qu’est-ce que je crains de perdre si je lâche prise ?

Image 2 : Vous aimeriez être soumis(e)

Vous avez été troublé par la lecture de Cinquante Nuances de Grey. Vous aimez vous accrocher aux barreaux du lit, comme si vous y étiez attaché ? Ou juste poser les mains sur le matelas, les bras en croix, offert à votre partenaire ? Jouer la passivité, c’est lui donner la possibilité de décider pour vous, d’être l’objet de son désir, quand il veut, où il veut, comme il veut. « D’un point de vue psychanalytique, cela renvoie à la toute petite enfance, lorsque nous étions complètement dépendants de notre mère », souligne Alain Héril. C’est à la fois retrouver le plaisir régressif d’être contenu, englobé par l’autre. Mais aussi celui de ne pas être responsable du scénario sexuel, ni de notre propre jouissance, ni de la sienne. Donc de repousser toute culpabilité.
Dans la soumission préexiste l’excitation de nous abandonner à l’autre, de lui déléguer le pouvoir sur notre plaisir. Mais aussi, avantage du lâcher-prise, « la possibilité de nous laisser surprendre par nos pulsions et par notre propre montée de jouissance que, pour une fois, nous ne contrôlons pas », ajoute le thérapeute. Sans oublier une part de réaffirmation narcissique : « Je suscite chez l’autre un désir si fort qu’il en devient incontrôlable. »
La question à vous poser : qui serais-je si je prenais les rênes ?

Image 3 : Vous aimeriez vous exhiber

Vous aimez vous promener en sous-vêtements devant votre partenaire. Vous goûtez de faire l’amour en pleine lumière, offert à sa contemplation. Le décolleté profond ou le torse dénudé, vous vous amusez à piéger son regard, à créer de la fascination ? 
« L’exhibitionniste est un hypnotiseur, précise Alain Héril. Il aime surjouer la séduction, la théâtraliser. » Ce fantasme d’affirmation de soi, lié à la construction narcissique, révèle un besoin d’être reconnu, de se sentir désirable, excitant aux yeux de son partenaire. Parce qu’il s’impose au regard de l’autre, il n’est pas dénué d’une pincée de domination. Parce qu’il frôle parfois les limites de la décence et flirte avec la peur d’être surpris – faire l’amour sous un porche, sur une plage… –, il crée de la tension et nourrit l’excitation d’une dimension transgressive. 
La question à vous poser : qu’est-ce que je cherche dans le regard de l’autre ?

Image 4 : Vous aimez être voyeur(se)

Vous êtes celui qui, sur la plage, aime regarder les autres. Pendant l’amour, vous aimez voir l’excitation et le plaisir de votre partenaire. Et vous ne détestez pas apercevoir vos ébats dans le reflet d’un miroir ou d’une vitre. « Le voyeurisme naît de la curiosité enfantine pour la scène primitive, celle de notre conception », éclaire Alain Héril.
Mais, si l’exhibitionniste a besoin du voyeur pour nourrir son fantasme, l’inverse n’est pas vrai, car l’excitation est suscitée par le fait de voir sans être vu. « Comme dans le film Fenêtre sur cour, d’Alfred Hitchcock, où les voisins ne savent pas qu’ils sont observés par James Stewart », ajoute le sexothérapeute. Son but est de saisir l’intimité de l’autre à son insu : « Pour le voyeur, entendre ses voisins faire l’amour n’est excitant que parce qu’il imagine ce qu’ils font. »
Aux films pornographiques, trop évidents, le voyeur préfère la téléréalité, plus croustillante, dans laquelle il guette l’étreinte inattendue.
La question à vous poser : qu’est-ce que j’espère voir ? 

Image 5 : Vous aimeriez être plusieurs

Dans vos rêveries érotiques, il arrive que se glisse un ou une inconnu(e) ? Que vous imaginiez une expérience à trois, toutes les combinaisons de genres étant possibles. Vous incarnez parfois un personnage – infirmière, pompier, hôtesse de l’air… ? « Autant de façons d’introduire, par l’imagination, un tiers, décode Alain Héril. Il y a, dans le fantasme de triolisme, l’idée d’une plus grande puissance sexuelle. L’assurance de jouir plus, pour les femmes, ou de plus faire jouir chez les hommes. »
Il peut également s’y glisser une part de fantasme d’homosexualité, le trio permettant de toucher, sans culpabilité, un corps du même sexe que le sien. Un cran plus loin, le mélangisme met en scène de nombreux participants et se situe dans l’indifférenciation des corps. Dans ces partouzes imaginaires, il est plus facile de laisser libre cours à ses fantasmes sans avoir à les assumer, puisque l’on ne sait pas qui est qui, ni qui fait quoi.
La question à vous poser : si nous sommes à plusieurs, quelle est ma place ? 

"Je ne pensais pas avoir de fantasmes

Bérangère, 38 ans, a fait le test

« Je fais partie de ces gens qui assurent qu’ils n’ont pas de fantasmes. Et, dans mon cas, je jure que c’est vrai ! Je vis depuis quatorze ans avec le même homme, notre sexualité est heureuse – conjugale certes, mais épanouissante. Je ne rêve pas du plombier, ni de faire l’amour dans une voiture – c’est mauvais pour mon dos ! –, encore moins de me faire fouetter. J’ai donc fait ce test sans trop y croire.
Curieusement, je n’arrivais pas à me départager entre les photos parlant du voyeurisme et celles de l’exhibitionnisme. Ce qui m’a fait toucher du doigt à quel point ces deux fantasmes exploraient la même polarité. J’ai fini par opter pour la “position” voyeuriste, tout en me disant que c’était à cent lieues de moi… J’ai besoin de la pénombre pour faire l’amour, je suis très gênée par les effusions amoureuses en public, et les films porno m’ont toujours mise mal à l’aise.
Et puis j’ai compris, avec la question finale, qu’en fait toutes ces réticences me protégeaient contre une peur. Peur de quoi ? Peur de voir quoi ? Et si mon malaise à l’idée de voir quelque chose de sexuel disait mon envie de le faire ? Ou de me montrer ?
Je n’ai pas encore trouvé la réponse. À moi de “voir”, maintenant. »
                                

Votre vie sexuelle vous satisfait-elle ?


Voici six questions essentielles à vous poser sur votre plaisir afin de savoir avec précision à quel point votre vie sexuelle vous satisfait. Et de comprendre quels sont les facteurs qui influent sur votre degré d’épanouissement.
Longtemps, la recherche de satisfaction sexuelle ne fut pas à l’ordre du jour de l’équilibre des couples. Pire encore, il n’était pas anormal que les femmes fassent passer la leur loin derrière celle de l’homme. Mai 68 et la révolution sexuelle qu’il inspira ont heureusement changé la donne.
Mais près d’un demi-siècle plus tard, on assiste à un bouleversement inattendu : l’orgasme est non seulement recherché, mais souvent exigé. Il peut même devenir l’élément à l’aune duquel le couple juge de la qualité de sa relation. Et beaucoup de thérapeutes constatent que l’absence de satisfaction est devenue une raison de se séparer.
Faut-il s’en plaindre ? Faut-il au contraire s’en réjouir ? Il est en tout cas intéressant de voir la place que nous accordons au plaisir dans notre sexualité. Catherine Blanc nous guide pour effectuer ce bilan.

À quelle période votre vie sexuelle a-t-elle été la plus épanouie ?

La sexualité n’est pas liée à ce qui se passe exclusivement au lit, elle dépend du regard que l’on porte sur soi, du regard de l’autre, de la relation dans le couple, du contexte social. Ainsi, le chômage ou un deuil peuvent-ils mettre en berne un épanouissement sexuel, tout comme une promotion ou une grossesse peuvent le favoriser.
Il est intéressant de vous pencher sur ces différents facteurs et de tenter d’analyser leur influence sur votre satisfaction actuelle. Assimilez-vous l’intensité de votre plaisir à l’âge, à un partenaire particulier, à un moment passé dans la vie de votre couple ? Ce peut être une excuse avancée pour éviter de vous interroger. Pour certains, le bonheur est toujours dans le passé, une disposition psychique qui a des répercussions sur leur satisfaction présente. C’était forcément mieux avant ? Oui, mais ces partenaires – ou ces moments – tant idéalisés aujourd’hui n’existent plus, et ce n’est peut-être pas un hasard…
Nos partenaires correspondent toujours à des projections inconscientes et l’insatisfaction que nous ressentons aujourd’hui peut parler de notre choix de ne pas être satisfaits. Ou, à l’inverse, ce sera mieux demain ? En idéalisant un paradis jamais atteint, vous laissez filer le temps. Parvenir à la satisfaction sexuelle malgré l’âge, le temps qui passe, la relation au long cours, s’appuie sur la conquête du présent, l’émerveillement renouvelé, le plaisir gagné avec la maturité. Quelle est votre tranquillité à accueillir votre plaisir ? Vivre ici et maintenant est bien plus passionnant que regretter le passé ou remettre sans cesse la jouissance à demain.

Mesurez-vous votre satisfaction à l’intensité d’un orgasme ?

L’orgasme est soumis à une sorte d’échelle imaginaire. Bien que la satisfaction sexuelle soit une recherche légitime, de quoi parlons-nous exactement ? De l’intensité de la décharge orgasmique ? De l’harmonie avec votre partenaire ? Vous pouvez trouver une vraie jouissance dans le simple apaisement des tensions créées par vos pulsions ; vous pouvez aussi éprouver du plaisir en vous sentant en communion avec votre partenaire.
Toutefois, au moment de l’orgasme, l’autre n’existe plus, il disparaît, et nous restons seuls avec notre plaisir. La preuve, s’il se manifeste – un changement de rythme, une parole inappropriée –, nous pouvons ressentir une certaine agressivité à son égard. En revanche, dans le plaisir, en dehors du pic orgasmique lui-même, l’autre est présent. Et nous nous nourrissons également de cette communion-là. Il n’est pas question de suggérer que l’un soit mieux que l’autre, car nous oscillons, sans doute, sans cesse entre ces deux pôles.
Dans l’acte sexuel délivré de l’inquiétude, les partenaires se font confiance, acceptent de se perdre, de jouir ou pas, et de se retrouver. À moins que vous n’ayez trop de mal à composer avec votre partenaire et que vous préfériez vous en tenir éloigné. Et mesurer la qualité de la relation à l’intensité de vos orgasmes.

Quelle est la position qui vous donne le plus de plaisir ?

Est-ce celle qui vous excite parce qu’elle bouleverse un interdit ? Ou celle qui vous procure confort et sécurité ? Chacun a sa propre gamme. Dans certaines positions, nous pouvons nous sentir trop exposés, ou trop coincés ou encore trop actifs… Une position vous plonge dans l’inquiétude et ne vous attire pas ? Personne n’est obligé de tout essayer. Ou bien vous l’avez explorée et elle ne vous plaît pas ou plus, et, dans ce cas, il n’y a aucune raison de vous forcer parce qu’elle attire d’autres.
Prenons l’exemple de la sodomie, toujours source de réticence. Faudrait-il l’adopter, et au nom de quoi ? De la norme ? Pour répondre à la demande du partenaire ? Nous interroger sur les positions ne veut pas dire qu’il faut parvenir à dépasser nos réticences ou nos répulsions. Vous avez le droit de poser des limites. Les seules questions valables sont : est-ce que je me sens empêché, limité ? Est-ce que j’en souffre ? Seules ces entraves-là valent la peine d’être étudiées de près.

Qu’est-ce qui pourrait améliorer votre jouissance ?

La question se rapporte à la capacité que vous avez à accueillir vos fantasmes, votre jouissance sexuelle, autant d’éléments qui supposent d’être actif physiquement et intellectuellement. Sauf que, bien souvent, nous préférons penser que notre plaisir viendra de l’autre, ce qui est en partie vrai, mais en partie seulement. Attendre du partenaire qu’il nous donne satisfaction permet de nous déresponsabiliser : c’est le prince charmant qui va venir réveiller la belle endormie ; c’est la bombe sexuelle qui viendra régler un problème d’érection…
Accuser sa compagne ou son compagnon est toujours une façon de faire face à une difficulté, de s’en sortir honorablement, tactique d’ailleurs valable dans tous les domaines, pas uniquement sexuels. Mais d’où jaillit la source de votre plaisir ? Vient-elle de l’autre, de ses aptitudes ? Ou se niche-t-elle dans votre faculté psychique à accueillir votre jouissance ?
Améliorer votre satisfaction sexuelle dépend avant tout de vous. Certes, c’est plus compliqué, moins facile que d’accuser l’autre. La bonne nouvelle ? Le pouvoir est entre vos mains.

La masturbation est-elle votre plus grande source de joie ?

La masturbation parle du droit, salutaire et légitime, que nous nous donnons de nous faire du bien. Mais si vous placez cette pratique bien au-dessus de la relation sexuelle à deux, cela vaut la peine de s’y arrêter. Pensez-vous que vous vous connaissez mieux que personne ? Que vous êtes seul capable de vous procurer du plaisir ? Que vous avez plus de liberté à vous laisser aller ? Est-ce une difficulté à jouir sous le regard de l’autre ?
Le sexologue Jean-Yves Desjardins a établi une distinction entre deux plaisirs sexuels : l’un orgastique, mécanique, obtenu par des stimulations ; et le second orgasmique, qui englobe la décharge émotionnelle et inclut la dimension relationnelle. Or, l’autoérotisme est celui qui sollicite le moins l’émotion. Si vous privilégiez cette pratique sexuelle, est-ce par peur de vous laisser déborder ? Votre plaisir est-il diminué par votre difficulté à accueillir vos émotions et celles de l’autre ? Sauf que, en voulant les évincer, vous évincez par la même occasion un partenaire…

Estimez-vous qu’il faut en parler lorsque vous êtes insatisfait ?

Tout dépend de la fréquence et de l’intensité de l’insatisfaction. En effet, il serait dommage de distribuer des bonnes et mauvaises notes à chaque relation sexuelle. Certaines sont plus réussies que d’autres, cela n’a rien de dramatique. Pourquoi ne pas rire des loupés ? Ils peuvent créer une complicité et une libération des tensions : rire est déjà une jouissance !
Le discours ambiant fait de l’entente sexuelle du couple la mesure de son amour, ce qui est loin d’être vrai, tant le couple peut s’aimer, tout en ayant des difficultés sexuelles. Toutefois, si votre insatisfaction est permanente, qu’elle mine votre relation, il est important de vous en ouvrir à votre partenaire. Beaucoup de couples s’enferment dans un silence pesant, prenant le risque que l’un ou l’autre explose à un moment donné en disant des horreurs. Ou bien, chacun rumine dans son coin, espérant que l’autre va enfin découvrir, comme par magie, un comportement plus adéquat à ce qu’il souhaiterait. Une attitude qui rappelle celle de l’enfant qui n’avait pas besoin de parler pour que ses besoins soient satisfaits !
La prise de parole est un acte d’adulte mature. Pour autant, faites attention, certaines critiques peuvent en effet être indélébiles, d’où l’importance de bien choisir vos mots et le moment d’en parler, en dehors du lit de préférence. Il est toujours délicat d’aborder le sujet de la sexualité, car celle-ci dévoile le plus intime de nous-mêmes, et nous ne savons jamais ce que nous allons toucher dans l’inconscient, le nôtre et celui de notre partenaire. La bienveillance est donc de rigueur, avec des formules ouvertes comme « Peut-être que je m’y prends mal ? », « Et toi, que ressens-tu ? », ou encore « Je sens que je m’enferme »…
À bannir absolument, l’injonction « Fais-moi jouir », ou encore l’accusation « Tu ne sais vraiment pas t’y prendre », qui suggèrent que vous restez en dehors de la relation dans votre insatisfaction. Or, redisons-le encore une fois, nous sommes responsables de notre jouissance, qui dépend en grande partie de l’autorisation que nous nous donnons à l’accueillir. Il est bien plus intéressant d’essayer de surmonter à deux le malentendu, la difficulté à s’accorder, que de s’adresser mutuellement des reproches.

« Pour moi, la satisfaction prime sur le plaisir »

Jean-Christophe, 44 ans

« Lorsque Psychologies m’a demandé de faire le test sur le plaisir, je me suis vraiment demandé pourquoi. Certes, je me connais suffisamment pour ne pas faire la traditionnelle confusion entre plaisir et jouissance et, surtout en ce qui concerne les hommes, entre orgasme et éjaculation.
Avec ma compagne, nous parlons souvent de notre satisfaction sur une échelle de dix – comme celle de la douleur ! Il y a des orgasmes à neuf et des orgasmes à trois, mais chacun dit quelque chose de ce moment de sexualité. Et cela nous permet parfois d’ouvrir un dialogue sur une fatigue ou un stress particuliers.
Bref, il ne me semblait pas avoir besoin de me poser des questions. M’interroger m’a cependant fait prendre conscience de la notion de satisfaction que je trouve beaucoup plus importante que celle de plaisir, tellement galvaudé.
Et j’attends de faire les autres exercices. Et de les proposer à ma compagne. » 
                                      

Le sexe est-il meilleur quand on est amoureux ?


Dans « relations sexuelles », il y a le mot « relations ». Mais le lien affectif est-il un aphrodisiaque ou un frein à nos pulsions ?
« Découvrez votre point G », « Offrez-lui une nuit inoubliable », « Testez votre quotient sexuel »... Impossible d'échapper à ces injonctions, mi-sérieuses, mi-ludiques, dont la presse et les manuels de perfectionnement sexuel nous inondent. Aujourd'hui, pour être un bon amant, il faudrait, avant tout, être techniquement performant et émotionnellement désinhibé. Ce n'est qu'à cette seule double condition que l'on pourrait jouir sans entraves. Enfin. 
Ce qu'on oublie pourtant, c'est qu'aujourd'hui comme hier, la sexualité n'est pas réductible à la rencontre de deux gymnastes. Derrière les corps, les caresses et les figures de la sexualité, se bousculent des émotions, des pulsions, des fantasmes et des sentiments. Refoulés, ignorés, sublimés ou sacralisés, ils mènent la danse et nous lient à l'autre.
« Dans l'expression "relation sexuelle", les deux termes sont d'égale importance, rappelle Mireille Bonierbale, médecin et sexologue clinicienne. Mais actuellement, malheureusement, l'accent est davantage mis sur "sexuel" que "relation". Or, la relation sexuelle, c'est avant tout une rencontre : entre deux inconscients, deux histoires, deux désirs et deux corps. C'est cette complexité qui rend la sexualité passionnante, créative mais aussi fragile et menaçante, pour certains. Sans "l'autre", sans relation, il n'y a pas de sexualité. » Mais à une époque où chacun est sommé de régner en maître sur ses décisions, ses affects et sa destinée, la relation pose problème.

Inévitable dépendance

« Entrer dans la relation sexuelle fait peur, car cela oblige à rencontrer une certaine fragilité en soi. C'est la fin du règne de la toute-puissance. Alors, pour neutraliser cette crainte, on réduit l'autre à l'état d'objet de plaisir, on jouit de lui. On croit ainsi s'affranchir de la dépendance affective inhérente à toute relation humaine, explique la sexologue Catherine Blanc. C'est le but de tous ces guides techniques : nous rassurer en nous faisant croire que si l'on est techniquement performant, on peut jouir pleinement sans que les émotions et les sentiments ne viennent parasiter la sexualité. » Ressurgit alors la vieille question, d'autant plus irritante qu'elle se pose tôt ou tard à tous, même à ceux qui croyaient en avoir fini avec elle : sexe et sentiments sont-ils compatibles ? 
Louis, 37 ans, célibataire, assume sans complexe son passé de « serial lover ». Depuis deux ans, il vit une relation intense avec une jeune femme aussi « intello que sexuelle », son vrai « alter ego », selon ses dires. Tout irait pour le mieux, si ce n'était pour Louis cette impression de plus en plus pesante de se sentir prisonnier d'un attachement qui, par moments, lui donne envie de disparaître sans laisser d'adresse.
« Je suis fidèle à Isabelle depuis deux ans, pas la moindre aventure, je n'en ai ni besoin ni envie. Mais j'ai réalisé qu'au fond, je lui en voulais d'être celle avec qui je m'éclate le plus dans tous les domaines. Sexuellement, c'est une révélation. Ça pourrait juste être génial, mais le problème, c'est que je me sens dépendant de la jouissance que j'éprouve avec elle. Je sais que je vais dire un truc aberrant, mais c'est comme si elle avait pouvoir de vie et de mort sur moi. Et ça, j'ai de plus en plus de mal à le supporter. » 
Une analyse sauvage aurait tôt fait de conclure que, comme de nombreux hommes, Louis souffre du clivage « mère-putain » et que la femme qu'il admire ne peut pas être celle qui le fait jouir, mais pour le psychanalyste Gérard Bonnet, les choses sont un peu plus complexes. Selon lui, la question de l'attachement et de l'inévitable dépendance qui en découle, renvoie chacun à son port d'attache originel. La relation sexuelle serait le plus puissant des réactivateurs de notre inconscient. Tout ce qui nous a touchés, émus, liés, dans les premiers moments de notre vie, puis dans notre enfance, est d'origine sexuelle (au sens de sexualité pulsionnelle : les soins du corps, la nourriture, les caresses... ). Et ce que nous cherchons inconsciemment dans la sexualité, c'est revivre ce parcours.
« Lorsqu'on a été cajolé, désiré, aimé mais sans être étouffé par la mère, on va chercher à revivre dans la sexualité avec l'autre ces bons moments. Et le mélange « sexe et sentiments » ne posera pas problème, bien au contraire. En revanche, si ce premier lien a été marqué trop peu sécurisant ou au contraire dévorant, on va se protéger en ne prenant de la sexualité que la jouissance, pas la relation. A l'âge adulte, la maturité sexuelle, c'est parvenir à combiner de manière équilibrée génitalité et idéalisation de l'autre. »

De l'aventure au déclic

En clair, les sentiments ne doivent pas étouffer la pulsion sexuelle, et la pulsion sexuelle doit laisser la place à l'attachement. « Même si c'est pour une aventure passagère, explique Gérard Bonnet, on peut être en relation intense, intime, dans le partage et l'échange même pendant deux heures et avec une personne qu'on ne reverra pas. »
Fabien, 38 ans, s'est révélé sexuellement avec la femme qui aujourd'hui partage sa vie depuis huit ans. « Et le bonheur continue, précise-t-il. Avant Camille, je ne m'étais jamais complètement éclaté sexuellement, j'étais vraiment trop anxieux, je ne pensais qu'à faire jouir ma partenaire, qu'à avoir une érection qui tienne, bref j'étais un peu entre parenthèses. Même quand c'était des aventures d'un soir. Quand je suis tombé amoureux de Camille, il y a eu comme un déclic. Non seulement mes sentiments pour elle ne me freinaient pas, mais au contraire, le fait de me dire que c'était la femme de ma vie m'a permis de me « lâcher » en toute sécurité. Quand elle m'a dit qu'elle n'avait connu ça avec personne, je lui ai répondu : moi non plus. Les hommes ne savent pas de quoi ils se privent quand ils cloisonnent sexe et sentiments ! »
                               

Un week-end pour doper sa sexualité


Envie de réveiller votre sensualité et de booster votre sexualité ? Et si vous y consacriez un week-end ? Au programme : deux jours entièrement dédiés à votre désir et à votre plaisir.
Routine, libido en berne, fatigue, stress… Le tourbillon permanent dans lequel nous évoluons met souvent à mal notre vie sexuelle, fréquemment reléguée derrière nos vies familiales et professionnelles et nos soucis quotidiens. Qui n’a jamais soupiré en pensant à la fougue des débuts ou rêvé à de nouveaux horizons érotiques ? Alors quoi de mieux qu’un week-end placé sous le signe du désir et du plaisir, pour insuffler une nouvelle énergie à notre vie sexuelle ? « L’idée, c’est de prendre du temps pour s’arrêter sur sa sexualité, explique la sexologue Marianne Pauti. Ce peut-être le temps d'un week-end, ou deux jours, n’importe quand. Ou même un seul, si on n’a pas un week-end, ou bien trois jours, si on a un peu plus de temps. » Objectif de cette parenthèse érotique et sensuelle ? Se retrouver, se détendre et s’épanouir sexuellement ensemble.

Première étape avant le week-end : un peu d’introspection

Parler de sexe… Facile à dire, mais pas toujours à faire. Chez de nombreux couples, la sexualité reste même encore souvent un sujet tabou. « Certains ont beaucoup de difficultés à trouver les mots et les moments appropriés pour en parler, analyse Marianne Pauti. Du coup, ils n’évoquent jamais le sujet. Ou alors pour dire qu’il y a des problèmes. Il n’est jamais question de la sexualité qui va bien ». Avant le week-end, la sexologue recommande donc de se livrer, ensemble, à une petite introspection. « Il ne s’agit pas uniquement de remettre en question l’autre. C’est aussi se remettre en question soi, s’interroger véritablement. Et son couple aussi. »
=> Les pièges à éviter
 - Accuser ou culpabiliser l’autre ou soi-même.
« Les "c’est de ta faute" ou "c’est ma faute" sont à bannir. De même que les comportements castrateurs chez les femmes, ou dévalorisants chez les hommes. Le but, c’est de parler de ce que l’on ressent soi ».
 - Penser à la place de l’autre
« Lorsque que l’on est amoureux, on imagine souvent que l’être aimé sait ce que l’on pense. C’est source de quiproquos extraordinaires ! Se livrer à une introspection de sa vie sexuelle, c’est au contraire expliquer précisément à l’autre ce que l’on aime… ou pas. Et écouter ce dont lui-même a envie, ou non. Parfois, ce partage fait réaliser que l’on n’aime pas forcément les mêmes choses. Mais c’est bien de le savoir. D’autant que l’on finit toujours par trouver des terrains d’entente (parfois de nouveaux, d’ailleurs) ».
- Etre négatif
« Il faut être très positif si l’on décide de consacrer un week-end à booster sa sexualité. Comment avancer en se focalisant sur ce qui ne va pas ? On laisse donc tous les vieux dossiers concernant d’éventuelles mésententes ou déceptions sexuelles de côté ».
=> Quand parler de sa sexualité ?
« Si certaines personnes ont besoin de se sentir un peu désinhibées pour réussir à parler de sexualité, il est en réalité souvent difficile d’avoir une vraie discussion dans un contexte érotique, parce qu’elle risque précisément de briser l’érotisme. »

Préparer son week-end

S’évader le temps d’un week-end pour se consacrer à sa sexualité demande un minimum de préparation. Escapade à la mer, à la montagne, ou à la campagne, réservation d’un hôtel romantique, séjour à l’étranger… A chacun ses goûts et son budget ! L’enjeu ? Changer d’air. « Partir confère un caractère festif, particulier, au week-end. C’est pour cela que les gens ont une bien meilleure sexualité pendant les vacances, lorsque le quotidien et la routine sont mis à distance ». Pas question, donc, ce week-end-là, de faire des lessives, de tondre la pelouse ou d’aller déjeuner chez ses parents… Vous ne pouvez pas partir de chez vous ? Pas de problème, confiez vos enfants et vos animaux, cuisinez ou faites-vous livrer de bons repas, mettez-vous sur votre 31… Faites en sorte d’être tranquilles pour ne vous préoccuper que de vous !

Les derniers jours avant le week-end

Préparer sa valise
- Les incontournables : Contraception, préservatifs, lubrifiant si nécessaire… Pour ne pas courir les pharmacies pendant le week-end !
 - En fonction de votre appétit : huiles de massage, bougies, lingerie, jeux érotiques, sex toys, accessoires coquins, littérature érotique, déguisements… Pour Marianne Pauti, « il est important de faire les choses que l’on sent. Lorsque l’on essaye quelque chose uniquement pour faire plaisir à l’autre, on finit par s’en vouloir, par lui en vouloir. Il ne faut pas se forcer, ni chercher à forcer l’autre. Et si on veut transgresser un peu, mieux vaut le faire vraiment par rapport à ses envies ».
 - Déconseillé : son ordinateur, sa tablette, son smartphone constamment connecté à Facebook, la dernière série ou le dernier roman dont tout le monde est accro, des dossiers de travail… Au risque, sinon, d’emporter les soucis quotidiens avec soi.
 
Faire une cure de bonne forme
« Notre vie sexuelle est bien meilleure quand on est en bonne forme physique », estime Marianne Pauti. Au programme, donc, de la dernière semaine avant le week-end : de bonnes nuits, une bonne alimentation, peu ou pas d’excès (alcool en tête), du sport, et des moments passés à se chouchouter (soin en institut, nouvelle coupe de cheveux…).
Dernière nuit avant le départ : chacun de son côté
La veille, chacun dort chez soi, ou chez des amis ; ou l’un dans le lit, l’autre sur le canapé… Rendez-vous à la gare, l’aéroport ou même directement sur le lieu du week-end. « L’idée, c’est de se mettre dans l’état d’esprit de redécouvrir l’autre ». Et aussi de retrouver l’émoi des premiers rendez-vous…
                                            

Sexe : ce que les préliminaires révèlent

Sexe : ce que les préliminaires révèlent

Une injonction féminine, les préliminaires ? Pas si simple. Moments complices de sensualité, ils cachent des secrets insoupçonnés et peuvent concentrer à eux seuls les enjeux du couple. Avec leurs malentendus et leurs attentes…
Les yeux pétillent. Les joues s’empourprent… Nathalie, 31 ans, évoque ces moments intimes avec gourmandise : « Me cambrer sous ses caresses, entendre son souffle qui accélère, trouver sa peau sous les étoffes, sentir ses mains qui me cherchent, me serrent, me pétrissent. L’explorer avec ma bouche, humer son odeur devenir plus forte et fondre sous sa langue. Lui dire des mots crus et le voir s’emporter… » Les images défilent, plus sensuelles les unes que les autres. Sujet chaud, pour celui qui raconte comme pour celui qui écoute.

Les préliminaires, une préparation à l'amour

Préparation sensorielle à l’amour, les préliminaires attisent l’imagination et les désirs de certains, et soulèvent, pour d’autres, de grandes inquiétudes. Moment de la rencontre des corps et de l’expression du désir, « ils concentrent les enjeux relationnels du couple. Grandioses quand le désir circule librement. Réfrigérants lorsque les difficultés, les frustrations et les récriminations s’en mêlent », observe Brigitte Martel, gestalt-thérapeute. Si bien que, dans les cabinets de psys, les préliminaires font souvent l’objet des premières plaintes. « Elle n’a jamais envie », « Il n’est pas assez tendre »… Un regret que l’on imagine plus féminin. À raison : l’enquête menée par le psychiatre et anthropologue Philippe Brenot sur la sexualité montre qu’ils constituent, pour les femmes, le moment préféré de l’amour. Mais 67 % des hommes de plus de 50 ans et 48% des trentenaires admettent s’y adonner d’abord pour leur compagne. Peut-être par méconnaissance de leurs bienfaits.

Axel, 36 ans, en couple depuis deux ans, y voit « l’éveil des sens, l’abandon des défenses et l’ouverture à une réceptivité qui n’est pas celle de la vie de tous les jours ». Sas parfois indispensable pour couper du quotidien et faire monter le désir, ils ne sont pour autant pas toujours nécessaires. « Lorsque l’envie est là, elle est impérieuse », confie Maxence, 43 ans, marié depuis treize ans. C’est aussi, pour Martine, 46 ans, divorcée, « le moment pendant lequel nous nous mettons en harmonie » ; qui donne, complète Axel, « la tonalité de la relation sexuelle : joueuse, bestiale, tendre… ».
Les préliminaires sont en effet l’expression de notre désir d’union. Ils nous échauffent, ouvrent les zones érogènes et mettent les corps en résonance. « Selon la tradition chinoise taoïste, le désir de la femme s’ouvre au coeur, tandis que celui de l’homme prend sa source au niveau de son sexe, explique Danièle Flaumenbaum, gynécologue, acupunctrice et auteure de Femme désirée, Femme désirante (Payot, “Petite Bibliothèque”, 2011). Les caresses, les paroles et les baisers font donc descendre les énergies féminines, dont l’excitation est plus intellectuelle, sentimentale, et monter celles de l’homme, lui permettant de s’ouvrir au désir. » En unifiant ainsi les corps, les préliminaires autorisent un plaisir global, moins centré sur les zones génitales.

Les préliminaires, un condensé de notre histoire

« Ils me permettent de fuir une sexualité plus fougueuse, dont je crains qu’elle ne soit acceptée par mes partenaires, avoue Victor, 49 ans, et me plongent en même temps dans une grande vulnérabilité. » Un moment parfois inquiétant pour les hommes, inconsciemment travaillés par l’angoisse de castration. « Selon la théorie freudienne, lorsque le petit garçon prend conscience de la différence des sexes, il est saisi de peur : si les filles n’ont pas de pénis, il imagine qu’il peut perdre le sien », rappelle le sexothérapeute et psychanalyste Alain Héril.
Avec, en plus, un conditionnement culturel à prouver leur virilité par leur capacité à pénétrer. Mais lorsque cette contrainte de performance est lâchée, « profiter des préliminaires, c’est aussi profiter de ce que nous n’avons pas et honorer la différence des sexes », affirme Danièle Flaumenbaum. Les prémices nous laissent le temps de nous regarder, de nous sentir, de nous goûter et, chemin faisant, de glorifier le corps de l’autre en lui montrant combien il est désirable. Ils nourrissent alors la confiance en soi et en sa capacité à répondre au désir de l’autre.

Des caresses enveloppantes, une perte de repères, « chacun retrouve, de manière inconsciente, sa peau de bébé, celle du corps éveillé au plaisir sur toute sa surface. Et, bien sûr, les sensations connues lorsqu’il était nourrisson dans les bras de sa mère », souligne Danièle Flaumenbaum. Parce que les préliminaires remettent en jeu la communication sensitive d’avant le langage, lorsque nous ne nous savions pas séparés de ceux qui s’occupaient de nous… Mais aussi parce que nous y revivons l’essentiel de notre développement, « un condensé de notre histoire, annonce Alain Héril. La façon dont nous acceptons d’être regardés, caressés raconte qui nous sommes, comment nous avons été accueillis par nos parents ».
Par la bouche, notamment, nous avons connu nos premières satisfactions. « Avec les baisers mouillés, nous retrouvons les sensations du foetus avalant le liquide amniotique, puis du bébé tétant sa mère, connaissant ainsi, pour le garçon, ses premières érections, et pour la fille, ses premières contractions de l’utérus », décrypte Danièle Flaumenbaum. Plaisir du liquide chaud venant nous nourrir, de succion autant que de satiété, plaisir sexuel…

Les préliminaires, un espace de régression

« Les préliminaires constituent un formidable espace de régression. Pourquoi s’en priver ? C’est le bac à sable ! » s’amuse Alain Héril. Nous jouons à explorer le corps de l’autre, à être soumis ou dominateur, actif ou passif. Ils sont d’autant plus transgressifs que nous nous autorisons ce qui fut longtemps considéré comme des pratiques dégradantes – fellation, cunnilingus. À condition de se laisser aller à des pensées que nous jugeons parfois honteuses, incompréhensibles ou qui nous effrayent. Car « ici plus qu’ailleurs dans la sexualité, nous faisons remonter les parties sombres et inavouées de nous-mêmes, reprend le sexothérapeute et psychanalyste. Les fantasmes, donc l’inconscient, s’y expriment de façon ludique, déchargeant ses pulsions. En cela, ils ont, à l’instar du rêve, une fonction compensatrice pour l’équilibre psychique ».

Quand commencent et finissent les préliminaires ?

Tout cela annoncerait l’extase, si nous arrivions à nous mettre d’accord sur ce que sont les préliminaires. Car, pour les amants comme pour les psys, le mot même entraîne des malentendus. Quand commencent-ils ? Au lit ou bien avant ? Pour Maxence, c’est « un regard coquin, une caresse appuyée, qu’il y ait, ou pas, passage à l’acte ensuite ». Pour Nathalie, c’est bien plus que cela : « Les rires partagés, les petites attentions… Tout ce qui permet la confiance, la complicité. »
Car attention, prévient Alain Héril, « nous ne pouvons nous contenter de gestes techniques pour stimuler l’envie. Les préliminaires, c’est la circulation du désir, dès que les amants se le disent et se le montrent », poursuit-il, incluant donc la phase de séduction : porter de la lingerie sexy, érotiser un dîner au restaurant, s’envoyer des « sextos » de plus en plus chauds. Quand finissent-ils ? Là encore, les avis divergent. Selon Danièle Flaumenbaum, c’est le prélude à la pénétration. Si la femme a appris, petite, que son sexe se prolongeait à l’intérieur de son corps et qu’il était fait pour recevoir celui de l’homme, « être pénétrée est le signe d’une sexualité adulte assumée. Sinon, elle reste ignorante de sa capacité d’accueil, comme une poupée qui n’a pas de vagin », ajoute-t-elle.
« Bien sûr, la pénétration est importante, modère Alain Héril, mais elle n’est plus une fin en soi. Nous sommes revenus de la vision freudienne de la sexualité, selon laquelle seul vaut l’orgasme vaginal, qui n’a d’ailleurs de vaginal que la localisation de la sensation. Car ce sont les bulbes vestibulaires du clitoris, descendant le long de la paroi du vagin et gorgés de sang, qui font toute la sensation orgasmique. » D’après Brigitte Martel, « réduire les préliminaires à une étape avant le coït met les amants dans l’attente, dans la pression de la suite, avec l’incapacité de vivre pleinement le moment présent ». Pour Victor, la définition est large : « Il m’arrive de faire un cunnilingus avant comme après le coït. Je n’ai pas de plan d’action, sauf que je suis plus détendu après le premier orgasme de ma partenaire. Débarrassé de la pression de la faire jouir, je suis plus présent à mes sensations et aux siennes. C’est peut-être là, pour moi, la fin des préliminaires… »

Les préliminaires, un langage en soi

Tout le jeu consiste alors à en profiter comme d’un espace d’échange émotionnel. Grand moment de communication lorsqu’ils sont investis à leur juste valeur, ces prémices peuvent aussi cristalliser les conflits du couple. Car ce que nous faisons ou pas, à cet instant-là, dit beaucoup de nos difficultés. Comment entrons-nous en relation avec l’autre ? Qu’aurions-nous envie qu’il nous dise pour que nous nous sentions considéré ? Lui disons-nous ces besoins ? Sommes-nous à l’écoute des siens ? « C’est aussi le moment de toutes les ouvertures », analyse Brigitte Martel, qui conseille à ses patients en difficulté de prêter attention à ce qui s’y joue. Une responsabilisation difficile… mais indispensable pour en prendre tout le bénéfice. Moment d’apprivoisement, d’harmonisation des désirs, c’est celui de l’élan vers l’autre, de l’intimité, mais aussi de l’écoute de soi. Pour tout cela, les préliminaires nourrissent le lien amoureux… bien au-delà de la chambre à coucher.
                                     

Pourquoi le sexe est bon pour la santé


Regain d’énergie générale, sensation de rajeunir, meilleure santé : le plaisir sexuel agit comme un remède naturel et la libido prolonge la vie. Explications.
 De nombreuses études le confirment : le désir, cette pulsion de vie contribue à notre longévité. Tout simplement parce que le plaisir de faire l’amour rend heureux, et que l’état de félicité est excellent pour le système immunitaire. Le plaisir physique, source d’énergie, favorise un meilleur équilibre hormonal. L’explosion des endorphines dans le cerveau au moment de l’orgasme crée cette sensation d’euphorie, puis de bien-être : calme, réduction du stress et de l’anxiété et sommeil récupérateur à la clé.

L’hormone du câlin

L’hormone qui nous met dans cet état et nous rend accro l’un à l’autre, c’est l’ocytocine. Boostée par les caresses et les baisers, elle atteint son maximum dans le sang au moment de l’orgasme. Bien connue pour déclencher l’accouchement et développer l’attachement mère-enfant, l’ocytocine joue également un rôle dans la protection contre le cancer du sein. Libérée par la stimulation des mamelons lors des échanges sexuels, elle aiderait à éliminer les éléments carcinogènes des glandes mammaires. « Les femmes dont la poitrine est régulièrement caressée pendant les échanges sexuels sont mieux protégées du cancer du sein. C’est ce que révèle une étude de 1995, explique Sylvain Mimoun, gynécologue, et sexothérapeute. Faire l’amour booste la circulation générale et locale. Des relations sexuelles régulières abaissent ainsi les risques de phénomènes inflammatoires qui font le lit des cancers et des maladies cardio- vasculaires. En cas d’abstinence, il est donc conseillé de se caresser. »

Les hommes aussi concernés

« Du côté masculin, une étude américaine, réalisée sur 30 000 hommes et confirmée par une étude australienne, montre que des éjaculations fréquentes abaissent le risque du cancer de la prostate », explique Frédéric Saldmann, cardiologue, nutritionniste et auteur deLa Vie et le temps (J’ai lu, “Poche”, 2012). Les statistiques sont plus que précises : à partir de douze éjaculations mensuelles la prévention devient significative et vingt et une éjaculations par mois réduisent ce risque d’un tiers. En effet, le massage prostatique effectué lors du rapport et l’émission de sperme contribueraient à éliminer les cellules carcinogènes. Et il réduirait aussi les microcalcifications qui s’accumulent dans la prostate. Là encore, les études soulignent qu’en l’absence de rapports sexuels, la masturbation protège la prostate.

Les besoins du coeur

À la trappe l’idée que l’activité sexuelle est dangereuse pour le coeur. Au contraire. Chez les femmes c’est l’abstinence, mais aussi l’insatisfaction qui augmenterait les risques d’infarctus du myocarde. Chez les hommes, selon une étude de l’université de Bristol de 1997, le risque de mortalité cardio-vasculaire est divisé par deux pour les amateurs de plaisir sexuel. Excellent exercice physique, l’activité sexuelle augmente la fréquence cardiaque, élimine les toxines par la sueur et tonifie les muscles.
Mais faut-il vraiment comptabiliser les échanges sexuels, pour s’assurer santé et longévité ? « On peut avoir l’orgasme triste, purement électrique, sans aucun sentiment de plénitude et de réalisation, déplore Alain Héril, psychothérapeute et sexothérapeute. Ce qui fait l’alchimie d’une sexualité épanouie, ce n’est pas la quantité, mais la qualité de nos échanges. » La sexualité qui équilibre corps et esprit est avant tout affaire de désir. « Et c’est ce désir, sexuel ou non, qui est fondamentalement réparateur », insiste le psychothérapeute.
Comment entretenir son désir quand on est seul ? En prenant du plaisir à ressentir, tout simplement ! En se plongeant dans des lectures sensuelles. « Frissons érotiques garantis », promet Galya Ortega, thérapeute holistique et auteure de Pratique du massage taoïste(Marabout, “Poche”, 2012). On n’hésite pas non plus à s’épancher entre amis sur le sujet. Enfin, on joue en permanence avec sa sensualité, en se masturbant, en se faisant masser ou en se massant. L’idée est d’extravertir ses sens, en se parfumant, en se délectant à table, en roucoulant quand on chante, en faisant la fête sensorielle avec la nature, le vent sur la peau, le sable sous les pieds, les bras autour des arbres…

Entretenir l’attirance

Ils vivent ensemble depuis quinze ans, vingt ans et plus, et pris par leurs obligations professionnelles et familiales, ils ont mis peu à peu leur sexualité entre parenthèses. Ce n’est pas pour autant la fin de l’amour. Selon un sondage TNS Sofres réalisé pour Notre temps, « les trois quarts des retraités en couple sont amoureux ». Alors quand on s’aime, on se demande comment profiter de cet amour. On peut déjà donner du temps à sa relation. Partir seuls en week-end. Noter, chacun de son côté, les cinq critères qui faisaient « que c’était bien avant ». Et oser se parler de ses fantasmes.
« Parler estompe la gêne et les malentendus, souligne Philippe Baschoux, sexothérapeute. Le grand ennemi du désir c’est le silence. » On peut aussi réapprivoiser le rapport de peau à peau. « Les massages sont une bonne idée, mais sans enchaîner sur un rapport sexuel, du moins au début, note Alain Héril. Il faut prendre le temps de voir ce qui se remet en place dans l’attention du corps de l’autre. »

L’équilibre par la créativité

La sublimation, la capacité de réinvestir son énergie sexuelle dans une activité créative peut être une excellente solution à l’absence de sexualité. Exercice physique ou artistique, danse, écriture, théâtre etc. « Plus on va prendre du plaisir dans une création, avec du partage et des échanges, plus le désir, sexuel ou non, va se renforcer et nous rééquilibrer intérieurement », souligne Alain Héril.
« J’ai traversé des périodes d’abstinence liées à une absence de partenaire, confie la comédienne et vidéaste Myrtille Chartuss. Mais j’en ai souvent profité pour démarrer de nouvelles créations. Dans ces moments de forte créativité, je n’ai pas souffert de solitude sexuelle. Au contraire, j’étais dans la stimulation des projets. »

Abandonnée par son mari, dépressive, Sylvie ne voulait pas rencontrer d’autres hommes. Mais elle a senti que quelque chose en elle voulait éclore et elle s’est mise à l’aquarelle. Lors de séances avec son groupe, elle a pu décrire « des moments d’émotions proches de sensations de plaisir sexuel ». Bien sûr, on n’a pas d’orgasme en peignant !
Quoi que… Mais Sylvie a pu faire plus facilement le deuil de son ancienne relation. Autre excellent moteur du désir, le théâtre amateur qui engage le corps, l’imagination et la créativité. Sur scène, on ne voit pas ce qu’on fait, mais on est accrédité par l’autre. Quelqu’un vous regarde. Et voir dans d’autres yeux qu’on est apprécié, cela renarcissise. C’est le fondement même du désir.
                                     

Quelle sexualité pendant la grossesse ?


Devenir mère, tout en restant femme. La plupart des futures mamans y aspirent. Ainsi, elles sont nombreuses à revendiquer le droit à une sexualité épanouie et ce, à toutes les périodes de leur vie. Grossesse comprise. Alain Héril, sexothérapeute et psychanalyste, nous en dit plus sur ces neufs mois, qu’il perçoit surtout comme un « bon prétexte à la découverte et à la créativité. »
 Et côté sexualité, tout se passe bien ? » Voilà une question que peu de femmes enceintes ont du entendre au cours de leur grossesse. Car si de nombreux aspects psychologiques ou médicaux sont abordés par les différents spécialistes rencontrés tout au long de ces neufs mois, le sexe demeure souvent absent. « L’idée qu’une femme enceinte ne devrait consacrer son énergie, sa pensée et son corps qu’à la gestation est encore très présente », constate Alain Héril. Résultat ? Les ouvrages sur la grossesse abondent chez les libraires, mais la sexualité n’y est, au mieux, évoquée qu’au détour d’un chapitre, voire de quelques pages. « Et d’une manière générale, souligne le sexothérapeute, cela reste très confidentiel et mis de côté. » Pourtant, en dehors de certaines positions morales et de quelques rares contre-indications, rien n’empêche de concilier grossesse et sexualité épanouie. Bien au contraire.

La grossesse, une révolution

Rares sont les femmes à confier qu’être enceintes n’a rien changé à leur vie sexuelle. Si la grossesse n’est pas une maladie, elle entraîne néanmoins un véritable bouleversement hormonal, corporel et psychique, qui ne laisse ni les femmes, ni leurs compagnons, indifférents. « Parce qu’elle joue sur leur humeur, sur leur comportement, sur leur corps, la grossesse a inévitablement un impact sur leur sexualité, affirme Alain Héril. Le contraire serait même étonnant. La future maman, lorsqu’elle est enceinte, n’est plus seule. Elle est habitée par cet enfant qui grandit en elle. Cela amène forcément un certain nombre de questions qui ne se posaient pas avant. »
Il s’agit donc, pour les femmes, d’appréhender leur intimité dans un nouvel état d’esprit, mais aussi, dans un nouveau rapport au corps. « Pour nombre d’entre elles, la grossesse est une occasion de découvrir de nouveaux plaisirs. Pour d’autres, il arrive que cela soit plus compliqué. Parce qu’elles sont plus crispées, ou plus inhibées, et qu’elles ont plus de mal à se laisser aller. Mais dans tous les cas, les sensations sont toujours différentes, » explique le sexothérapeute. Et pour les pères ? C’est un peu le même topo. « Chez les hommes, habités par de nombreux fantasmes, la grossesse peut soit entraîner une hyper-érotisation de leur compagne, soit, à l’inverse, engendrer une hypo-sexualisation, voire, parfois, des blocages. »

Premier trimestre : l’installation

Les neuf mois que composent une grossesse ne sont pas tous identiques, et c’est la raison pour laquelle la sexualité évolue et change en fonction des étapes et des modifications corporelles, hormonales ou psychiques traversées. Dans l’esprit de beaucoup de femmes, le premier trimestre est vécu comme celui de l’installation, de la nidification, avec les inquiétudes que cela peut générer. « Souvent, explique le sexothérapeute, le troisième mois est très attendu, parce qu’il est celui où le risque de fausse couche commence à disparaître. »
Pour le corps, c’est aussi un trimestre riche en bouleversements, car c’est toute une machine qui se met en route au service du bébé à venir. « L’organisme réagit à l’installation de la grossesse, avec son lot de petits désordres. Maux de têtes, nausées, vomissements, fatigue… sont autant d’obstacles à une sexualité réellement épanouie. La femme porte l’essentiel de son attention sur ce qui se passe en elle, se prépare à accompagner la gestation de son enfant. Il est donc courant que ce ne soit pas le moment de la grossesse où circule le plus de désir dans son couple. »

Deuxième trimestre : la plénitude

Le deuxième trimestre, en revanche, signe souvent le début d’un réel mieux être et le retour de la libido. « De nombreuses femmes vivent, dès le quatrième mois de grossesse, une sorte d’état de plénitude dans lequel leur désir sexuel va se réveiller, et parfois même, prendre des formes plus fortes encore que ce qu’elles avaient pu connaître avant d’être enceintes, explique Alain Héril. Il en est même certaines qui découvrent et vivent pour la première fois l’orgasme à ce moment-là de leur vie. »
Un épanouissement soudain qui s’explique notamment par l’optimisation des cinq sens de la femme pendant la grossesse. De la même manière que celle-ci perçoit mieux les odeurs ou les goûts, sa sensorialité, son toucher sont décuplés. « Il ne s’agit pas simplement de dire que les femmes ont subitement plus envie de faire l’amour, mais de bien comprendre que leurs sensations, ainsi que la perception qu’elles ont du monde et d’elles-mêmes, sont modifiées. Elles s’interrogent sur leur corps, leur façon de le regarder, de l’appréhender, et à l’intérieur de cela, la question de la sexualité se pose de manière tout à fait naturelle. »

Troisième trimestre : la créativité

Enfin, le troisième trimestre est celui que le sexothérapeute perçoit comme le plus « créatif » de tous. Et ce, pour une raison à la base purement anatomique : gênés par un ventre qui prend de plus en plus de place, le couple doit faire preuve d’ingéniosité pour contourner cette nouvelle contrainte. « Si les rapports sexuels deviennent inconfortables, les amants peuvent laisser libre court à leur imagination dans le choix des positions, mais aussi, pourquoi pas, dans leurs scénarios sexuels et leurs fantasmes, affirme le sexothérapeute. La grossesse est un bon prétexte à la créativité, et il serait dommage de s'en priver. »
Ainsi, nombreux sont les couples à mettre de côté la pénétration au dernier trimestre pour laisser plus de place aux caresses, et à des rapports érotiques plus sensuels que sexuels. « Certaines personnes craignent de faire mal au bébé en faisant l’amour, ajouter Alain Héril. Une peur qui n’est pas justifiée (l’homme pénètre le vagin de sa partenaire, alors que le bébé, lui, se trouve dans l’utérus), mais qui doit néanmoins être entendue. »

Ce que ressent le bébé

S’il est donc impossible de faire mal au bébé, et même d’entrer en contact avec lui, pendant le rapport, il n’en n’est pas moins vrai que certaines informations peuvent passer jusqu’à lui. « Il n’a en aucun cas conscience que ses parents sont en train de faire l’amour, rassure d’emblée Alain Héril, mais ce qu’il peut recevoir, ce sont des effluves, des vibrations, des flux hormonaux… qui vont s’inscrire en lui sur le terrain du plaisir, du contentement, de la joie. Et ce, de la même manière qu’il perçoit les émotions négatives de sa mère si celle-ci est stressée ou en colère. » Le tout, bien sûr, de façon très ouatée et différée, un peu comme s’il était assis au fond d’une piscine : il peut entendre le son des voix, la musique, mais tout cela reste pour lui très lointain et feutré.

Quand le sexe pose problème

« Dans tous les cas, la base de toute sexualité épanouie reste le désir, rappelle le sexothérapeute, et si celui-ci n’est pas au rendez-vous, pour l’un ou l’autre des partenaires, le plaisir ne le sera pas non plus. Les troubles du désir ne touchent pas tous les couples de futurs parents, mais ils sont néanmoins une réalité pour quelques-uns d’entre eux qu’il ne faut pas négliger. » Il est fréquent que la libido soit fluctuante pendant la grossesse, et ce, tout aussi bien du côté des hommes que des femmes. « D’ailleurs, nous sommes quasiment tous concernés par un désir qui va et vient, pendant la grossesse comme à tous les autres moments de la vie, rationalise Alain Héril. Ce qui change par contre, c’est que la grossesse entraîne parfois des projections qui peuvent annihiler le désir. »
Ainsi, certaines femmes enceintes peuvent être touchées par ce que la psychanalyse appelle un investissement libidinal de l’enfant à naître : « Pour elles, explique le sexothérapeute, c’est comme si le fait d’entrer dans la fonction maternelle les privait de leur fonction d’amante. Après l’accouchement, certaines retrouvent naturellement leur sexualité, d'autres surinvestissent leur bébé et délaissent leur partenaire. » Plus ou moins de la même façon, certains hommes peuvent eux aussi êtres troublés et souffrir de ce qu’Alain Héril nomme l’hypo-sexualisation : leur compagne, parce qu’elle est enceinte et porte leur enfant, devient intouchable, perdant son statut de femme en devenant mère. « Il ne faut surtout pas que ces hommes se forcent, car souvent, tout revient comme avant à l’issue de la grossesse. Néanmoins, je déconseille que ceux-ci assistent à l’accouchement, car ils sont plus sensibles au traumatisme que cela peut être, et risquent même, pour certains, de ne pas réussir ensuite à rexesualiser leur femme. »
Dans tous les cas, un travail sur soi et sur leurs projections peuvent aider les partenaires à renouer avec leur désir, et l’aide d’un thérapeute, ou d’un sexologue, peut être parfois bénéfique. « Certains couples me consultent parfois juste pour s'entendre dire que leur vie sexuelle peut être satisfaisante pendant la grossesse, même si elle est différente. Par exemple sans pénétration, avec simplement des caresses, des massages et beaucoup de sensualité. Comme s'ils avaient besoin de ma caution. Il ne faut pas que les couples hésitent à envisager leur vie sexuelle d’une nouvelle façon pendant ces neuf mois. » Libre à chacun, ensuite, de prolonger les découvertes faites pendant la grossesse ou de retrouver, nostalgiquement, sa sexualité d’avant.
                                              

Les femmes fontaines ont-elles plus de plaisir ?


Malgré l’abondance d’informations sur la sexualité, nous sommes encore victimes d’idées reçues qui compliquent notre vie sexuelle. Chaque mois, Catherine Blanc, sexologue et psychanalyste, remet à sa place l’une de ces croyances.
« Les femmes fontaines émettent une quantité importante de liquide lors de l’acte sexuel. Certaines jouissent pleinement de ce débordement incontrôlable et de cette liberté de se montrer dans l’abandon, à l’instar des hommes et de leur éjaculation. D’autres n’accueillent pas ce lâcher-prise avec autant de tranquillité et, terrorisées, s’interrogent sur leur appétit sexuel. Inquiètes pour elles ou leur partenaire, la fontaine devient alors source d’angoisse.
À l’heure actuelle, le phénomène reste mystérieux sur le plan physiologique. Des hypothèses sont avancées mais, à ce jour, aucune certitude. Le liquide émis aurait une structure chimique proche de celle de l’urine, sans en être pour autant, d’où le malaise de certaines femmes fontaines qui l’assimilent à une envie d’uriner et tentent de se retenir…
Or, dans l’amour, contrôle et plaisir ne vont pas de pair. Plus que jamais, le mystère donne libre cours aux projections, inconscientes ou non, et c’est bien dans l’imaginaire que se construit la puissance du plaisir ou l’interdit, bien plus que dans le phénomène lui-même.
Ainsi, la jouissance de la femme fontaine peut être limitée tout autant qu’amplifiée par la signifi cation qu’elle donne à cette incontrôlable “montée des eaux”. Toujours avides de preuves du plaisir féminin, nous sommes tentés d’envisager l’orgasme de la femme fontaine comme plus intense.
Pourtant, dirait-on d’un homme qu’il a plus de jouissance quand il émet beaucoup de sperme ? Aurait-il donc moins de plaisir en vieillissant, puisque la quantité diminue ? Combien a-t-il fallu de temps pour que l’éjaculation et la jouissance ne soient plus confondues chez l’homme ?
Au nom de quoi faisons-nous ces raccourcis, si ce n’est par besoin de prouver, ou de nous prouver, notre capacité à jouir ou à faire jouir ? Curieux débat, qui parle de notre société obsédée par la mesure, donc de notre anxiété… »
                                         

Sexualité : des femmes décomplexées


Elles sont, dans l’ensemble, bien plus libres et épanouies que leurs aînées en matière de sexualité, ne considèrent plus la masturbation comme taboue, mais n’atteignent l’orgasme qu’une fois sur cinq en moyenne. Philippe Brenot, psychiatre et sexologue, a interrogé plus de 3 000 femmes sur leur rapport au désir, au plaisir, aux pratiques sexuelles… Retour sur une fascinante plongée dans la vie intime féminine.

Elles sont libérées et décomplexées

Des femmes décomplexées : c’est le portrait que dresse Les femmes, le sexe et l’amour (Les Arènes), enquête réalisée auprès de 3 404 femmes hétérosexuelles de 15 à 80 ans, vivant en couple. Des femmes libres dans leur sexualité, leur intimité, et leur couple. « En trente ans, on a assisté à une véritable libération des comportements, analyse Philippe Brenot. Et cela transcende les générations. Aujourd’hui, les femmes osent dire ce qu’elles désirent. Qu’elles ont envie de sexe, par exemple. Avant, elles étaient en position inférieure, souvent de soumission, et ne disaient pas ce qu’elles pensaient ».
Autre libération aussi : celle du regard que les femmes portent sur elles, puisqu’elles sont 60% à se trouver belles, 67% à s’estimer sensuelles.

La gentillesse éveille leur désir

Lorsqu’on leur demande ce qui excite leur désir, ce sont la gentillesse et les attentions qui arrivent en tête. « Pour une femme, les conditions de l’amour sont d’abord relationnelles, rappelle Philippe Brenot. Lorsqu’en consultation, je demande à des couples s’ils ont un problème, l’homme va toujours me répondre sur le plan directement sexuel : « on ne fait pas assez l’amour », « j’ai parfois des pannes », tandis que la femme va mettre en avant l’environnement : « on a un manque de communication », « on n’arrive pas à accorder nos attentes »... Pour le sexologue, la gentillesse et les attentions font d’ailleurs partie intégrante de la sexualité : « C’est le premier niveau d’accès. Et cela, il faudrait que tous les hommes le comprennent. »

Elles fantasment surtout avec leur compagnon

 Autre porte d’entrée dans la sexualité : les fantasmes. Et là, surprise ! Les plus connus - faire l’amour avec un inconnu, avec George Clooney, le fantasme de viol… - ne sont pas toujours les plus fréquents. Sur les 71% de femmes qui confient avoir des fantasmes, la plupart y mettent en scène leur compagnon. Les plaquant contre le mur, leur faisant l’amour sauvagement… « Les fantasmes avec le partenaire enlèvent de la culpabilité. La même étude dans les années 1970 aurait montré des résultats très différents, notamment beaucoup de fantasmes par rapport à la transgression. Aujourd’hui, les choses ne sont plus vraiment interdites. Nous sommes dans une génération post-sida avec une valeur très forte : la fidélité. »
Et c’est donc ce même compagnon que l’on retrouve dans les nombreux fantasmes autour du multipartenariat. « La sexualité de groupe excite, chez les hommes comme les femmes. Mais ce qui ressort de tous ces fantasmes, c’est surtout le désir d’une sexualité différente car le quotidien ne procure pas assez d’excitation ».

Une femme sur deux atteint souvent l’orgasme

Côté plaisir, il existe, pour Philippe Brenot, une vraie « discrimination orgasmique » entre les hommes et les femmes. Les chiffres le confirment : si l’orgasme est atteint systématiquement par 90% des hommes, il ne l’est que par… 16% des femmes. 55% déclarent l’atteindre « souvent », 21% « rarement », et 5% « jamais ».
« Beaucoup de malentendus et de difficultés dans les couples viennent de cette asymétrie. Au point que l’on assiste ces dernières années à un nouveau terrorisme : celui de l’orgasme à tout prix. Des couples vont se séparer car la femme ne jouit pas, fait insupportable pour son compagnon, qui la quitte alors. Je n’avais jamais vu cela avant. D’autant que l’on sait très bien que l’orgasme féminin n’est pas du tout un bouton poussoir déclenché par le pénis de l’homme. Mais qu’il prend sa source dans les disponibilités féminines. »

Les préliminaires

Des disponibilités favorisées par les préliminaires, plébiscitées par 80% des femmes interrogées. Caresses, baisers, massages, fellation, cunnilingus… Autant de pratiques érotiques qui les invitent à la fois au relâchement et à l’excitation. « A être prêtes », en somme.
« Mais ce que souvent elles n’imaginent pas, c’est que ces pratiques permettent aussi à la sexualité de continuer tout au long de la vie. Cette dimension érotique est nécessaire à l’intimité de tout couple. » En moyenne, les préliminaires dureraient 12 minutes. Un temps insuffisant pour le sexologue. « Les préliminaires, c’est toute une journée ! C’est un ensemble de conditions qui rendent la chose possible. La plupart des femmes ne sont d’ailleurs pas prêtes à faire l’amour en un quart d’heure. Mais souvent, elles ne le savent pas. C’est aussi pour cela que parfois, il y a de la non jouissance. »

Pour elles, la masturbation n’est plus taboue


Se connaître soi-même : voici la clé, pour Philippe Brenot, de la jouissance sexuelle. Et en la matière, l’évolution est de taille : la masturbation n’est plus considérée comme une pratique taboue. 68% des femmes l’ont déjà pratiquée. 47% l’ont même déjà fait devant leur compagnon. Un sacré changement, quand on sait qu’en 1970, seules 19% des femmes indiquaient se masturber.
Mais l’importance de cette pratique n’est pas toujours comprise, tient à souligner Philippe Brenot. « La masturbation et l’autoérotisme sont les facteurs centraux d’une sexualité épanouie. Il ne s’agit pas uniquement d’activités solitaires. Elle nourrissent le désir, le coït ». Selon l’enquête, les femmes qui apparaissent comme les plus épanouies sont d’ailleurs celles qui disent se masturber le plus…

Pour la moitié d’entre elles, sexe et sentiments ne sont pas liés

Aujourd’hui, les femmes ont presque autant de partenaires que les hommes au cours d’une vie : 10 en moyenne, contre 14 pour les hommes. En 1970, 46% des femmes n’avaient connu qu’un seul homme… leur mari.
Elles sont également 56% à déclarer que pour elles, sexe et sentiments ne sont pas liés. Là encore, belle évolution. « C’est la preuve que les femmes ont connaissance d’une diversité de comportements, d’expériences. Parfois, elles font l’amour avec un homme dont elles ne sont pas amoureuses et cela se passe très bien. Mais cela ne veut pas dire qu’au fond, elles veulent vivre et sexe et sentiments séparés. Au contraire. »

Un tiers d’entre elles ont une sexualité difficile

Mais pour un tiers des femmes environ, qui ont l’impression de ne pas être sexuellement normales, la sexualité reste difficile. En cause majoritairement, pour le sexologue : l’absence d’information et d’éducation à la sexualité. « Laisser venir le désir, cultiver sa sensualité et son érotisme, ça s’apprend, ça s’entraîne, ça se développe... »
Plus grave, presque une femme sur deux avoue avoir déjà ressenti une émotion sexuelle négative intense : peur, honte, douleur, rapport forcé, agression… « Chez les hommes, on est à moins de 5%. Il y a donc là encore une asymétrie de vécu dont la gent masculine n’a pas conscience. La condition féminine est quelque chose de difficile. Il y a des violences en permanence et certaines expériences peuvent s’avérer traumatisantes. » Mais pour Philippe Brenot, c’est bien un message positif, d’espoir, qu’il faut retenir des témoignages de ces 3 000 femmes : « Les femmes sont beaucoup plus épanouies et heureuses dans leur sexualité qu’il y a cinquante ans. »
                                

Le point G est-il un fantasme ?


Malgré l’abondance d’informations sur la sexualité, nous sommes encore victimes d’idées reçues qui compliquent notre vie sexuelle. Chaque mois, Catherine Blanc, sexologue et psychanalyste, remet à sa place l’une de ces croyances.
« La question agite les milieux scientifiques : existe-t-il un endroit, dans le sexe de la femme, qui lui donnerait automatiquement satisfaction ? Il suffirait de trouver le bouton sonnette à actionner…
Toutefois, chercher le point G, c’est partir du principe que le plaisir ne serait qu’une histoire de zone érogène, c’est évacuer la participation consciente ou inconsciente de la femme. Or, cette dernière a du plaisir selon l’autorisation qu’elle se donne, et qu’elle donne à l’autre. Il vient de l’émotion qui entoure la rencontre. Certes, les terminaisons nerveuses jouent leur rôle, mais sait-on que l’une des parties du corps les plus innervées est la pulpe des doigts ? A priori, il est rare d’avoir un orgasme en touchant son bureau…
C’est donc bien à partir de ce que la femme projette dans la relation que sa sensibilité s’accroît et déclenche son plaisir. D’aucuns affirment que certaines femmes auraient un point G, d’autres pas. Ce qui est dérangeant, car cela signifierait que les premières sont plus aptes à jouir que les secondes.
Mais pourquoi voudrions-nous que le point G existe ? Ne dédouanerait-il pas la femme de la responsabilité de sa jouissance ? N’est-il pas là pour rassurer l’homme, qui aurait ainsi un mode d’emploi sans marge d’erreur ?
Ajoutons, pour les deux sexes, le réconfort de savoir la jouissance féminine circonscrite en un seul point, alors qu’elle est vécue depuis la nuit des temps comme une vague incontrôlable, potentiellement dévastatrice. Exit la peur féminine d’être débordante et débordée ! Finie la crainte masculine devant ce tsunami mystérieux.
D’ailleurs, les hommes surtout sont friands de trouver la sonnette du plaisir féminin. Comme une quête du Graal ? Plus que sa réalité, qui n’apporterait pas grand-chose à la relation sexuelle, ce sont les fantasmes que le point G suscite qu’il est passionnant d’interroger. »

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