Séduction

Rencontre : les pièges du coup de foudre

Une brûlure intense, une merveilleuse douleur… Le " bonheur à l’état pur " peut frapper n’importe qui, n’importe quand, et souvent ceux qui s’y attendent le moins. Son principal danger : faire croire encore plus fort en l’illusion de l’accord parfait.
Quand Pierre a croisé Sylvie, ni lui ni elle ne cherchait l’amour. Du moins en étaient-ils persuadés. Il venait d’aménager son loft et comptait profiter de sa somptueuse garçonnière ; elle s’apprêtait à partir étudier en Californie pour trois ans. Ce soir-là, elle organisait une fête pour son départ. Il débarqua chez elle au bras d’une vague conquête, le choc ! " L’attirance que j’ai éprouvée pour Sylvie était si violente que j’en ai eu peur, se souvient Pierre. Je ne voulais pas y croire, je me mentais à moi-même parce que ce coup de foudre dérangeait ma tranquillité ! J’ai quitté la soirée, persuadé d’en rester là, mais le lendemain matin sa présence me manquait déjà. Je l’ai appelée. " Même révélation chez Sylvie : " Dès que j’ai aperçu Pierre, j’ai été hypnotisée. J’ai su que mon destin se jouait en cet instant précis, qu’il était la mystérieuse pièce du puzzle qui manquait à mon bonheur. Quand il m’a téléphoné, j’ai pris la décision totalement folle d’annuler mon départ. Je ne l’ai jamais regrettée. "
Des coups de foudre, il en existe des milliers. Tous racontent la même chose. Une rencontre soudaine et violente qui projette les amoureux sur une autre planète où émotions, sensations et désir sont à leur paroxysme. En quoi ce type de rencontre est-il différent des autres ? Peut-il déboucher sur une relation durable ? Marie-Noëlle Schurmans et Loraine Dominicé, sociologues, Alain Delourme, docteur en psychologie, et Elsa Cayat, médecin psychiatre et psychanalyste, nous invitent à en comprendre les mécanismes pour mieux en déjouer les pièges.

Il ou elle est déifié(e)

Le coup de foudre est un amour d’emblée entier qui remet en cause l’existence même des êtres qu’il frappe. Comme envoûtés, ils ne suivent plus les étapes normales du processus d’intimisation et de la connaissance de l’autre, propres à la naissance classique d’une relation.
L’effet de surprise court-circuite la réflexion et sidère la pensée. " C’est comme un choc physique, raconte Séverine. Un coup sur la tête qui change les couleurs, les formes. On ne contrôle plus rien, on est propulsé sur orbite sans cesser de tourner. " En un instant, les amoureux se sentent seuls au monde, sans repères. Une brûlure intense – une merveilleuse douleur – les consume. " Love at first sight ", disent les Anglo-Saxons : " l’amour au premier regard ", le bonheur à l’état pur. " C’est un mélange d’aspects fascinants et effrayants, une mise en magie du destin, un brusque condensé des rapports de la vie et de la mort ", comme le définissent Marie-Noëlle Schurmans et Loraine Dominicé. Cet élan fusionnel repose sur un ensemble de désirs satisfaits simultanément : complicité, humour, sensualité, sexualité.
D’où une " complétude " absolue. " C’est aussi un choc “spéculaire” ", précise Alain Delourme. C’est-à-dire qu’inconsciemment chacun des partenaires croit se trouver en relation avec un autre lui-même, un jumeau, une image idéale de lui. Mais le coup de foudre n’est pas qu’un tête-à-tête narcissique, c’est aussi une rencontre paroxystique pendant laquelle " l’autre nous touche car, soudainement, il nous apporte ce qui nous manque. Et comme nous n’en avons pas conscience, cet autre est déifié ", souligne Elsa Cayat.

Ça n’arrive pas qu’aux autres

Personne n’est à l’abri. La foudre peut frapper n’importe qui, n’importe quand. Et, le plus souvent, elle tombe sur ceux qui s’y attendent le moins. Ils en sont si surpris qu’ils subissent de plein fouet ce qu’ils croient être " le " grand amour. Penser que ça n’arrive qu’aux autres est une erreur qui peut coûter très cher. Pris dans une déferlante amoureuse, certains sont prêts à tout lâcher sur un coup de tête, quitter mari ou femme, enfants, travail. S’y attendre incite à plus de prudence, à mieux comprendre qu’il peut s’agir d’une crise, sans prendre immédiatement des décisions radicales.
Il n’existe pas de prédispositions au coup de foudre. Mais il est vrai, toutefois, que certaines personnes s’engouffrent volontiers dans des conduites adolescentes avec, pour modèles, des personnages de contes de fées. Elles croient que le véritable amour doit fatalement commencer par cet envoûtement immédiat, puis croître dans une parfaite harmonie sexuelle et mentale, pour disparaître à la première déception. Une illusion que médias et cinéma favorisent en exposant sans cesse des amours de starlettes aussi brèves que fréquentes. L’amour en reste à ses débuts romantiques faits d’attirances sensuelles et de satisfactions narcissiques.

Le danger de la réciprocité imaginaire

Ce " miracle de l’amour ", ce rêve d’accord parfait, n’est pas seulement la naissance d’un lien, c’est aussi celle d’une aliénation. La confrontation irrémédiable avec la réalité n’en sera que plus brutale. Car toute rencontre amoureuse connaît l’étape nécessaire et douloureuse de la fin de la " lune de miel ". Mais, dans le coup de foudre, la prise de conscience de l’illusion est particulièrement difficile. En effet, ne sommes-nous pas persuadés qu’il s’agit d’un amour sacré, béni des dieux, reposant sur des bases solides car signe d’un destin infaillible ?
Attention ! Le piège de l’illusion peut conduire dans un autre piège, celui de la réciprocité imaginaire. En effet, dans bien des cas, cet attachement vertigineux n’est pas partagé. " S’accrocher désespérément à un être qui n’éprouve pas les mêmes sentiments peut conduire à l’érotomanie, cette forme de psychose passionnelle fondée sur l’illusion délirante d’être aimé ", prévient Elsa Cayat. Par ailleurs, avec cette perception d’amour total et absolu, les attaches du passé semblent fades et sans valeurs. Aussi, quand disparaît l’illusion du coup du foudre, les amoureux déçus ont-ils le sentiment d’avoir raté leur vie. Cependant, que cette rencontre se solde par une rupture rapide n’est pas nécessairement plus douloureux que dans d’autres relations. Plus fulgurante, la passion n’a pas avancé dans la maturité de l’amour, le partage du quotidien avec un projet de vie commun. Ne résistant pas à la vie " ordinaire " de " gens ordinaires ", le feu s’éteint aussi vite qu’il s’est allumé.

Une seconde rencontre s’impose

" Le coup de foudre induit forcément une crise, mais celle-ci n’est pas toujours fatale, reconnaît Alain Delourme. D’ailleurs, beaucoup de belles et longues histoires d’amour commencent ainsi. Leur continuité tient au fait qu’elles se sont accompagnées d’un travail de distanciation nécessaire à toute rencontre, encore plus lorsqu’il s’agit d’un coup de foudre. " L’image du partenaire ayant été surinvestie, il faut être capable d’entrer en relation avec la vraie personne : c’est-à-dire avec quelqu’un d’autre. Alors seulement, une vie de couple peut commencer. Mais à condition que chacun prenne en charge sa propre problématique : pourquoi ce coup de foudre a-t-il eu lieu ? Pourquoi l’autre prend-il tant de place ? Des questions valables d’ailleurs pour n’importe quelle rencontre amoureuse. Inconsciemment, la personne que nous aimons a été placée en position d’objet que l’on a peur de perdre. " Mais, dans le coup de foudre, cette peur prend aussi – paradoxalement – la forme d’un désir car un amour si fort est trop lourd à porter ", observe Elsa Cayat. Prochaine étape donc : une seconde rencontre du même partenaire.

Les rabbins marieurs reprennent du service

Retour de l’orthodoxie aidant, plutôt que d’attendre un hypothétique coup de foudre, de plus en plus de jeunes juifs religieux passent par leur rabbin pour trouver l’âme sœur. Leur règle de vie interdisant tout rapport de séduction, ils préfèrent renouer avec cette tradition ancestrale quelque peu oubliée par leurs parents. La procédure ne laisse aucune place au hasard : le rabbin propose des rencontres arrangées en tenant compte des envies et affinités de chacun, mais aussi du niveau social et intellectuel des familles.
Dans un endroit public, cinq rencontres de cinq heures chacunes sont alors organisées entre les deux partis. Le refus est toujours possible, mais la plupart des couples ainsi formés ne tardent pas à échanger leurs engagements. " Mon fils a refusé deux jeunes femmes, la troisième a été la bonne, explique Annie Ammar. Mariés trois mois après leur première rencontre, ils forment un couple exemplaire. Très amoureux, ils ont trois enfants et nos rapports avec la belle-famille sont exceptionnels. " Un conte de fées… ou presque.

L'amour au bureau, exercice à haut risque

Il est souvent tabou, parfois même interdit, et fait l’objet de nombreux fantasmes. Mais l’amour au bureau est surtout une réalité : près d’un tiers des couples se rencontreraient au travail. Enquête sur un exercice périlleux.

Quand Olive344, l’un de nos psychonautes, et sa compagne se sont rencontrés au cabinet de conseil financier dans lequel tous deux travaillaient, ils ont d’abord tenté de cacher leur relation. Comme la majorité des couples qui entament une relation intime au bureau. Mais à l'instar de beaucoup de cas, « les choses se sont sues. Et tout s’est dégradé. Des problèmes de confiance, des non-dits, des malentendus sont apparus au sein de notre équipe. » Résultat ? Les deux amoureux ont fini par quitter l’entreprise. « Mais nous sommes toujours ensemble ! L’amour au bureau ? C’est un jeu très délicat, à ne tenter que si la personne en vaut la chandelle ! ». « No zob in job » dit le proverbe bien connu. Pourtant, le monde professionnel est l’un des lieux les plus propices à la rencontre - selon une étude réalisée par la société Monster, en Europe, 30% des couples s’y rencontreraient d’ailleurs- et les entreprises les plus innovantes seraient celles où les relations intimes sont les plus nombreuses. « Qui est avec qui ? » Une banale discussion qui a lieu chaque jour devant toutes les machines à café. Mais qui reflète une réalité bien plus compliquée qu’elle n’en a l’air et surtout, non sans danger.

Entre tabou et fantasmes

L’amour au bureau, on en parle partout : à la cantine, dans les couloirs, pendant les pauses… Sauf, à en croire Loïck Roche, auteur de Cupidon au travail (Ed. d’Organisation), entre les dirigeants et les responsables des ressources humaines des entreprises. « Quand on leur demande s’il existe des relations intimes ou sexuelles au sein de leur organisation, la plupart du temps, ils répondent ‘non, il n’y a pas de ça chez nous’. S’ils acceptent que des gens puissent prendre 10 minutes pour fumer une cigarette, il leur est inconcevable qu’ils puissent passer ce temps à s’embrasser. Comme si, quelque part, une hiérarchie officieuse se créait par le plaisir des corps, échappant à la hiérarchie officielle. » Aux Etats-Unis, certaines entreprises vont même jusqu’à interdire à leurs salariés de se fréquenter. L’amour au bureau : un sujet qui reste tabou mais qui en fait fantasmer plus d’un. Qui n’a jamais éprouvé de désir pour son chef, sa collègue de travail, le petit nouveau ou la nouvelle stagiaire ?

Un endroit propice aux rencontres

Il faut dire que le monde de l’entreprise est un lieu idéal pour rencontrer quelqu’un. « On y joue un rôle, explique Loïck Roche. Contrairement à chez soi, on s’oblige à faire attention, à s’habiller correctement, à respecter les règles de civilité. Dès l’entretien d’embauche, on se trouve dans un rapport de séduction. » En plus, nous y passons la majeure partie de notre temps et nous y travaillons avec des gens qui ont les mêmes centres d’intérêts que nous… De quoi faciliter la rencontre. « C’est venu comme ça, au bout de 6 mois, raconte Marie, 35 ans. On passait beaucoup de temps ensemble, on allait souvent déjeuner tous les deux. On avait fini par bien se connaître. Et on s’était découvert les mêmes goûts ». Et si l’on nous répète qu’amour et travail ne font pas bon ménage, tout nous invite pourtant à mélanger vies privée et professionnelle. Réunions tard le soir, dîners de travail, soirées, séminaires… Difficile parfois, d’établir une frontière.
                                    

Coup de foudre : pouvons-nous tous être frappés ?

Le coeur qui s’emballe, les yeux qui s’illuminent, la certitude d’avoir trouvé celui ou celle qui va nous combler… Nous aimerions tous – ou presque – connaître ce grand frisson. Et si tomber amoureux au premier regard n’était pas seulement le fruit du hasard ?
 Je sais que c’est puéril, mais j’aimerais vivre ça au moins une fois dans mon existence. » Léna, jolie trentenaire célibataire, en rêve. L’affaire est entendue : le coup de foudre n’est garant de rien, ni de durée, ni de bonheur dans la relation amoureuse. Et il fait même l’objet de toutes les mises en garde : « C’est une illusion », « Déception garantie », « L’autre n’est jamais ce qu’il a l’air d’être », etc. Pourtant, il occupe une place de choix dans nos petites mythologies secrètes. Au fond, de quoi s’agit-il ? De « l’amour au premier regard, d’une idéalisation instantanée de l’autre », définit le psychiatre et psychanalyste Didier Lauru, auteur de Père-fille, une histoire de regard (Albin Michel, 2006).
De la certitude quasi immédiate d’avoir en face de soi quelqu’un dont la présence viendra inexplicablement nous combler. « C’est […] comme si je m’étais perdu et qu’on vînt tout à coup me donner de mes nouvelles », écrit André Breton dans L’Amour fou (Gallimard, Folio, 1976)... Et cela n’arrive pas dix fois dans une vie, préviennent les psychanalystes : « Une fois, c’est déjà bien. Deux, trois, c’est le maximum, confirme Didier Lauru. Au-delà, ce ne sont pas des coups de foudre, plutôt des comportements compulsifs d’“amoureux de l’amour”. »

Ceux qui l’ont connu évoquent un éblouissement instantané. « J’étais à un vernissage, se souvient Mélanie, 42 ans. J’ai eu l’impression que quelqu’un me regardait. J’ai levé les yeux : un homme grisonnant et souriant. J’ai pensé : “C’est un homme comme celui-là qu’il me faudrait. Il a l’air heureux mais profond. Je pourrais passer ma vie avec quelqu’un comme ça.” » Son émotion était partagée et, quelques instants plus tard, le monsieur « grisonnant » est venu lui parler : « Il a évoqué L’Homme qui marche de Giacometti, la force de l’art qui aide à avancer. Je me suis dit : “Oui. Maintenant, tu ne dis plus que oui.”
Depuis, je n’ai jamais cessé de lui dire oui. » Marine, 32 ans se déclare, elle, « incapable » de « céder » à cet emballement : « J’ai besoin de connaître l’autre avant de tomber amoureuse. Je ne peux pas, d’un claquement de doigts, fondre pour quelqu’un. Ça ne m’est jamais arrivé et je ne me le souhaite pas. » Il y aurait, d’un côté, ceux qui ont vécu cette expérience exaltante et parfois douloureuse, surtout quand elle est à sens unique. Et de l’autre, ceux qui en seraient exclus, sans forcément en souffrir puisqu’ils ne désirent pas l’expérimenter. S’agirait-il tout simplement d’une question de volonté ? Non. « Tout le monde peut potentiellement vivre le coup de foudre, y compris ceux qui ne le veulent pas consciemment, assure Didier Lauru. Mais certaines conditions doivent être réunies. » Et celles-ci n’ont évidemment rien à voir avec une envie, affichée ou pas, de connaître ces sensations.

Quand nous sommes disponible

D’abord, préexiste évidemment une rencontre avec celui ou celle qui déclenchera la secousse. Mais cela ne suffit pas : il faut être perméable aux effets du hasard, sans pour autant vouloir le forcer. Le psychanalyste Roland Gori, auteur de Logique des passions(Flammarion, “Champs”, 2005), éclaire la dimension irrationnelle du phénomène en citant Picasso : « “Je ne cherche pas, je trouve.” La logique est ici la même. Quand on cherche le coup de foudre, il est impossible de le trouver, parce que le volontarisme échappe aux conditions psychiques de ce sentiment amoureux très puissant, de cette forme de folie, de mirage qui nous saisit à la vue de l’autre. »
En fait, pour pouvoir l’expérimenter, il faut nous sentir disponible, inconsciemment dégagé de toute attache, hors de tout volontarisme. Quand Louise, consultante de 37 ans a rencontré Patrick à Hong Kong, elle n’avait pas du tout l’intention de tomber amoureuse : « Je démarrais un tour du monde avec un copain, et je ne cherchais vraiment pas une rencontre sentimentale. Je voulais me balader, découvrir d’autres horizons. J’avais envie de voyager. J’étais libre comme l’air, très disponible dans ma tête, et nous en étions au début de notre périple. Et puis, Patrick est entré dans ce bar où j’étais allée avec une amie qui partageait un appartement avec lui.
Dès que je l’ai vu, une petite voix en moi a murmuré un truc que je trouve d’ordinaire ignoble quand je l’entends chez les autres : “Je le veux.” Il m’était bizarrement familier. Il a commandé deux bières d’emblée, “à la chinoise”. Il se préparait à “se ruiner” consciencieusement la tête. Il ne m’avait même pas remarquée, je pense. Il s’est assis à côté de moi et j’ai senti son parfum. C’était comme une confirmation : il portait Pour un homme de Caron, le parfum de mon père. Nous avons bu, bien discuté. Nous nous sommes embrassés, je crois. Je ne m’en souviens plus très bien. Nous sommes partis ensemble en taxi. Nous étions ivres. Pendant le trajet, il m’a tapé légèrement sur la cuisse en riant : “Il me faudrait une femme comme toi, en fait.” Puis le taxi m’a déposée à l’hôtel.
Et le lendemain, nous sommes partis avec mon copain. Je n’étais pas triste. Je me suis dit qu’il fallait faire confiance au destin. Deux mois plus tard, à Paris, un soir, alors que j’étais au bureau, Patrick m’a téléphoné. Il était revenu en France, s’était souvenu de l’endroit où je travaillais, avait consulté l’annuaire. Nous nous sommes revus. Et voilà. Dix ans plus tard, nous vivons ensemble et nous avons deux enfants. »

Père lui aussi de deux enfants, Martin, ingénieur de 36 ans, se souvient avoir vécu deux ou trois coups de foudre, dont un partagé, il y a une dizaine d’années. L’aventure s’est très vite arrêtée : « Pendant quatre jours, tout a été merveilleux. Puis nous nous sommes aperçus que nous n’avions pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais triste : elle était jolie, intelligente, mais je voyais bien que ça ne pourrait pas fonctionner. Elle était engagée politiquement, voulait m’entraîner dans ses meetings. Moi, j’étais un jeune “branleur” que tout cela n’intéressait absolument pas.
Malgré tout, je garde un excellent souvenir de cette histoire. » Il a épousé une jeune femme dont il est tombé petit à petit amoureux, et ne pense pas que l’expérience se reproduira : « Aujourd’hui, je suis marié. Je ne crois pas que cela pourrait m’arriver à nouveau, parce que je suis heureux et épanoui dans ma vie personnelle et familiale. » Martin est comblé. Confirmation de Didier Lauru : « Le coup de foudre demande d’être ouvert à l’autre. Nous ne sommes pas tout le temps dans cette disponibilité-là. » Si nous sommes amoureux de quelqu’un, si nous sommes profondément bien avec lui, rien ne peut se passer.

Quand nous nous sentons manquant

Selon Roland Gori, pour se laisser envahir, « un certain état d’esprit est nécessaire : c’est une forme de nécessité intérieure dont nous n’avons pas conscience et qui a à voir avec le sentiment que quelque chose nous manque ». Quand nous nous sentons « complet », arrivé à destination, nous ne pouvons pas être saisi par cette coïncidence hallucinante : la perception d’un autre qui pourra panser nos blessures intérieures.
En revanche, si une insatisfaction indicible nous fait traverser l’existence de biais ou si nous sommes dans un état de profonde mélancolie, alors quelqu’un est susceptible d’apparaître là où il était attendu sans que nous sachions que nous l’attendions. « C’est souvent dans un ciel triste que survient cet éclair amoureux, quand nous avons traversé des événements difficiles qui nous ont vraiment atteint, analyse Roland Gori. C’est comme si quelqu’un surgissait tout à coup pour soutenir la voûte céleste de notre quotidien, devenir le “portemanteau” de notre manque à être. »
Marie, 41 ans, décoratrice, n’a éprouvé qu’un seul coup de foudre, qui n’a pas « abouti ». Et, à cette époque, elle n’allait pas bien du tout : « J’avais appris quelques mois auparavant que mon compagnon me trompait. Il m’avait avoué que tout avait commencé quelques jours avant la naissance de notre petit garçon, deux ans plus tôt. J’avais décidé de pardonner, mais l’image que me renvoyait mon miroir le matin me dégoûtait, surtout que ma situation professionnelle n’était pas brillante : je cachetonnais à droite à gauche et gagnais mal ma vie. Je me sentais indésirable et pathétique. Un matin, je suis allée à un rendez-vous fixé par un de mes employeurs dans un café avec un client potentiel. Un homme grand, dégingandé, avec des mains d’enfant et un regard atrocement mélancolique m’attendait.
J’étais saisie, mais je l’ai bien masqué. Sauf qu’à un moment, nos mains se sont touchées. J’étais bouleversée. Quant à lui, il était tellement dans sa tristesse qu’il n’a rien remarqué. Peu de temps après, un matin sur mon vélo, alors que je pensais à lui, je l’ai vu apparaître en face de moi à Vélib’ sur le pont que je traversais. J’ai cru à une hallucination. Il s’est arrêté. J’ai rougi, bégayé, failli perdre le contrôle de ma bicyclette et je me suis enfuie. Évidemment, il ne s’est rien passé. Je n’ai jamais su si mon sentiment était partagé. De toute façon, il y a peu peu de chances que cela ait été le cas… »

Pourquoi fuir ? D’après le psychanalyste Marie-Jean Sauret, auteur de L’Effet révolutionnaire du symptôme (Érès, 2008). le coup de foudre réunit toutes les promesses d’un objet précieux après lequel nous courons, et « cette perspective est parfois tellement effrayante que nous ne pouvons que nous sauver, pour échapper à l’angoisse suscitée par la rencontre avec ce qui éteindrait le désir en le satisfaisant. Dans cette expérience, l’autre nous révèle que quelque chose nous manque. Rejeter l’embrasement, c’est aussi un moyen de se prémunir contre la séparation. Certains préfèrent être seuls plutôt que de ressentir cela ».
Surtout quand ils manquent de confiance en eux. Un peu comme quand, petit, à l’école, nous étions fou d’un petit ou d’une petite camarade de classe. Nous ne voulions surtout pas qu’il le sache. Nous tentions ainsi de préserver cette émotion dont nous ne savions pas trop quoi faire, craignant que si nous avouions notre amour, l’autre le récuse, se moque de nous et que l’histoire s’achève par un abandon.

Quand nous sommes prêt à régresser

Apparition, hallucination, mirage, vision : tout, dans le coup de foudre, renvoie à la vue. Normal, affirment les psychanalystes, qui rappellent d’ailleurs que dans d’autres langues, l’expression de cette expérience se nomme « l’amour au premier regard ». Pour Roland Gori, le coup de foudre, c’est d’ailleurs « l’instant de voir ce qu’est la passion ». Notre oeil est capturé par ce que l’autre nous présente et notre raison chavire. Marie-Jean Sauret insiste sur le fait que cela arrive à des personnes pour lesquelles le désir passe par le regard : « L’apparence de l’autre joue le rôle d’un voile qui fait promesse d’un trésor si nous sommes capable de le soulever. »
Quand Martin se penche sur ses coups de foudre, il se souvient que « c’est toujours quelque chose dans leurs yeux qui m’a attiré ». Parfois c’était un défaut, un petit tic, et s’il cherche un point commun entre elles, chacune avait les yeux clairs, se rappelle-t-il.
Dans l’expérience du coup de foudre, Didier Lauru lie, lui, le regard à la toute petite enfance. Il frapperait, selon lui, plus particulièrement ceux qui sont en résonance psychique avec l’intensité des premiers regards échangés entre nous et notre mère (ou avec ceux qui nous ont chéris et aimés) quand nous étions nourrisson : « Tout cela ne relève pas de la volonté. C’est totalement inconscient. Dans cette aventure, nous régressons tout à coup, très très loin, très très vite. Pourquoi ? Parce que nous retrouvons des coordonnées, pas forcément physiques d’ailleurs, en rapport avec le regard ou certains traits maternels ancrés au plus profond de nous. C’est évidemment déroutant parce que cela nous dépasse. »
Nous sommes bouleversé, renversé parce que nous revivons la force des premiers échanges, la fascination, la découverte, la curiosité dévorante qui nous habitent en venant au monde. Comme si le coup de foudre donnait accès à une forme de « re-naissance .

Le coup de foudre est-il forcément réciproque ?

Non, et c’est bien là le drame. « Le coup de foudre intervient quand nous croyons avoir rencontré une personne qui nous parle de nous, détaille le psychanalyste Roland Gori. Elle nous a fait signe sans qu’on le veuille, mais aussi sans le vouloir elle. Et la réciprocité n’est évidemment pas garantie dans l’expérience. » Quand notre impression n’est pas partagée et que nous restons « bloqué » sur l’autre, nous courons le risque de nous « enfermer dans la passion et d’aimer dans la souffrance », conclut Didier Lauru, psychiatre et psychanalyste.
Seule solution : arrêter d’espérer, accepter l’idée que nous étions seul à vivre un mirage et essayer de passer à autre chose pour éviter de nous enfoncer dans la douleur.
                                      

Les 6 signes de l'amour naissant

Quand notre coeur balbutie au début d’une rencontre, difficile de savoir s’il parle bien le langage de l’amour. Certains indices peuvent nous mettre sur la voie. Quatre psys nous révèlent les comportements qui font dire « je l’aime vraiment ».
Bien sûr, il y a le coup de foudre, brutal, sans appel, qui n’entraîne aucune tergiversation. C’est l’amour fou au premier regard, même si cet emballement, à l’instar du feu de paille, ne dure parfois qu’un court moment. Et puis il y a l’amour naissant qui, lui, prend son temps pour se dévoiler. Pas forcément moins prometteur, mais plus ambigu dans ses manifestations. C’est lui dont nous parlons quand nous glissons à l’oreille d’un ou d’une amie : « Tu sais, je crois bien que je l’aime… »
Cette incertitude, loin d’invalider la force du sentiment, traduit une bataille en train de se livrer en nous. « Beaucoup d’éléments nous attirent vers l’autre – reconnaissance, confiance, sentiment de paix, de joie… – et presque autant nous en éloignent – peur d’être rejeté, de devenir dépendant, d’être envahi, de ne pas être prêt », constate la psychiatre et psychanalyste Catherine Bensaid. D’où ces trois pas en avant, un pas en arrière, valse-hésitation qui marque souvent un vif intérêt ! Décryptage des signes de cet amour naissant et encore balbutiant.

Les joues roses

Bien souvent, en amour, c’est le corps qui parle le premier, même si nous nous efforçons d’ignorer les signes qu’il envoie. « L’anxiété entraîne une poussée d’adrénaline, qui provoque une accélération du rythme cardiaque, une transpiration excessive, explique la médecin et sexologue Ghislaine Paris. Mais, en même temps, le sentiment amoureux, lui, libère de la dopamine, de la sérotonine, des endorphines, à l’opposé de l’adrénaline. Ces hormones de l’amour vont entraîner une dilatation des vaisseaux sanguins, qui donne des joues roses et, moins connu, colore le cou. Ces marbrures attirent le regard. Or, le cou est une zone de fragilité par excellence chez les humains. De façon très archaïque, quand nous tombons amoureux de quelqu’un, nous présentons à l’autre cette zone, en renversant la tête, preuve d’abandon et de confiance. »
La voix également se modifie : « Les femmes ont tendance à élever le ton, à adopter une voix plus aiguë, tandis que les hommes, eux, prennent une voix plus rauque, dans le but de se séduire mutuellement », poursuit la spécialiste. En cas de doute, soyons sûr que « le corps a ses raisons que la raison ignore », pour paraphraser Blaise Pascal.

Les maladresses

Nous voulons être intéressant et nous ne sortons que des banalités. Nous voudrions faire de l’effet, mais nous renversons notre verre… « Un soir, j’allais dîner avec un homme qui me plaisait beaucoup dans un restaurant libanais. Sur la table, il y avait des crudités et un petit piment que j’ai pris pour un poivron. J’ai croqué dedans et, instantanément, ma langue a doublé de volume. Nous avons atterri aux urgences ! » raconte Marianne, 40 ans, décoratrice.
Le sexothérapeute Alain Héril voit dans ce témoignage la force du désir à l’état brut, et dans cette langue en feu, un excellent moyen d’empêcher la parole de se dire, au profit de l’émotion. « Toutes ces maladresses sont une façon indirecte d’indiquer à l’autre que nous sommes troublé par lui, qu’il nous fait perdre tous nos moyens, détaille-t-il. C’est un signe fort que nous lui envoyons, bien qu’en apparence il semble contreproductif. » Même emballement chez la psychanalyste Sophie Cadalen pour ces actes manqués : « Voilà qui est très prometteur ! Notre inconscient s’amuse à nous jouer des tours. Notre appréciation de la situation nous file entre les doigts, c’est toujours le signe d’une rencontre importante. »


Les tactiques

L’amour naissant est peuplé de doutes et de tourments. Et, parfois, de tactiques dérisoires pour les masquer. Nous feignons de ne pas attendre de coup de téléphone, nous nous prétendons pris pour la soirée, alors que nous sommes libre comme le vent, pour ensuite nous morfondre. Que cachent ces mises en scène ? « La crainte de se dévoiler, au risque d’être éconduit, répond Alain Héril. C’est notre narcissisme qui est en jeu. Elles signent souvent une mésestime de soi. »
Ajoutons encore que nous avançons en terrain inconnu, obligé de penser à la place de l’autre, de nous comporter comme nous pensons qu’il aimerait que nous nous comportions, alors que nous l’ignorons ! Le naturel n’est pas vraiment au rendez-vous… Heureusement, Sophie Cadalen nous rassure : « Aucune stratégie ne résiste à l’amour. Feindre l’indifférence ne marche que si nous sommes relativement détaché. »

La résistance

« Non, ce n’est pas possible, ce n’est pas mon genre ! Et puis, c’est trop tôt, trop tard, trop… » Signe infaillible ou presque de l’amour naissant : la résistance que nous lui opposons. « Quand nous sommes en face d’un partenaire qui ne correspond pas à nos critères conscients, mais qui nous déstabilise inconsciemment, nous perdons pied, analyse Alain Héril. Dérouté, nous essayons coûte que coûte de revenir dans le droit chemin en nous raisonnant. » Ajoutons encore que, effrayé par notre désir, auquel, la plupart du temps, nous n’avons pas l’habitude de faire de la place, nous sommes tenté de fuir. Ce vertige s’accompagne d’un sentiment de panique : c’est bien beau tout ça, nous murmure une petite voix, mais si cela ne durait pas ? Autant devancer ce chagrin potentiel et fuir le bonheur de peur qu’il ne se sauve.

Les projections

Autre signe de l’amour naissant, cette propension que nous avons à nous projeter dans un futur heureux, même le plus prosaïque… « La première fois que j’ai rencontré Philippe, je me suis tout de suite vue lovée contre lui sur un canapé en train de regarder ma série télé préférée », sourit Lucille, 45 ans, infirmière. Pour Alain Héril, ces projections sont une façon de nous rassurer sur le déroulement à venir : « En nous passant un film où l’autre nous aime et nous désire, nous sautons l’obstacle de l’incertitude qui caractérise l’amour naissant. »
Sophie Cadalen met toutefois en garde contre ces projections hâtives qui peuvent traduire plus une envie d’amour qu’un amour véritable : « Je me méfie de ces scénarios où l’autre n’a pas beaucoup de place et doit entrer à tout prix dans un cadre. Aimer, c’est commencer à être prêt à faire de la place à l’autre, pas uniquement sur son canapé ! »

L'embellissement

Quand nous rencontrons quelqu’un qui nous plaît, nous tendons à minimiser les obstacles et à majorer les connivences. « Observez deux partenaires chez qui l’amour est en train de naître. Ils s’ébahissent de leurs points communs : “Enfant, tu passais tes vacances à Saint-Jean-de-Luz ? Moi aussi !” Et d’y voir un signe envoyé par le ciel », sourit Catherine Bensaid. « L’amour a cette faculté d’enjoliver la relation, mais aussi de nous rendre plus beau, plus belle, par un processus d’idéalisation de soi, remarque Alain Héril. Un sacré bénéfice secondaire qui risque de nous rendre aveugle. »

Gardons-nous de nous inventer un conte de fées, au mépris du réel. « Des jeunes femmes me racontent que si leur partenaire ne leur dit jamais “je t’aime”, c’est qu’il n’y pense pas… L’aveuglement a des limites ! » nuance la thérapeute. Beaucoup se croient amoureux de quelqu’un alors qu’ils sont simplement amoureux de l’amour. Dans ce cas, l’autre n’est là que pour combler une attente, un besoin. Comment savoir alors s’il s’agit d’amour ? Le sentiment échappe toujours au contrôle. « Nous voilà dépassé, sans intelligence aucune, ni de la situation, ni de nous-même ? N’en doutons plus, nous sommes amoureux ! Aimer est l’expérience la plus intéressante de notre vie d’humain. Alors, laissons de côté nos résistances et laissons-nous emporter », encourage Sophie Cadalen. L’amour naissant est du côté de l’aventure.
                                   

Ce qui se joue dans la rencontre

Non, on ne se choisit pas par hasard. Et si les tout premiers regards, premiers mots et premiers gestes dessinaient l’avenir de notre couple ?
La première fois que je l’ai vu, c’était à une soirée déguisée sur le thème des vampires, raconte Véronique. J’aurais dû me méfier : il a vampirisé ma vie pendant sept ans. Au-delà de l’anecdote se dissimule une question que se posent parfois les couples : « Qu’est-ce qui aurait pu nous laisser penser que notre histoire allait évoluer ainsi ? Tout était-il écrit dans notre rencontre ? » « Il n’y a pas de couple sans prédestination, affirme le psychanalyste Robert Neuburger. Mais il ne s’agit pas ici d’une fatalité venue de l’extérieur : c’est le couple lui-même qui fabrique sa propre prédestination. »
Certes, depuis que les psys se sont penchés sur les élans du cœur, nous savons que l’amour est, aussi, l’addition de deux névroses identiques ou complémentaires… « On ne choisit pas n’importe quel partenaire, explique Serge Hefez, psychiatre et thérapeute de couple. Selon la personnalité de ce partenaire, des parties de nous-même totalement inconnues, bonnes ou mauvaises, nichées à l’arrière-plan de notre conscience, vont se révéler et se mettre en mouvement. Souvent, le couple réactive des liens un peu archaïques et fusionnels, identiques à ceux du nourrisson et de sa mère. Pendant la fusion qui a suivi la rencontre, chacun a déjà inconsciemment repéré quelle est la faille de l’autre et qui fera écho à la sienne. » Il sera le sauveur, elle sera la sauvée ; elle soignera les séquelles d’une mère absente, il reproduira la tendresse d’un père aimant… Dans ce contrat implicite qui unit les deux inconscients, dès la rencontre, se dessinent déjà les moteurs du couple : lequel des deux partenaires sera le conciliateur, lequel exercera le pouvoir, lequel entraînera l’autre.
« J’étais étudiante, Jean était prof, raconte Marie-Anne. J’ai pris rendez-vous avec lui pour discuter de ma maîtrise. Sa première remarque m’a refroidie : il m’a dit “Mademoiselle, vous manquez d’ambition dans le choix de votre sujet.” J’ai failli quitter la pièce en larmes. Mais il a ajouté : “Si vous êtes d’accord, je peux vous aider à aller au-delà.” Il m’a guidée, soutenue, poussée. Je suis tombée éperdument amoureuse de lui : personne ne m’avait jamais donné une telle confiance en moi. Sa première remarque résume notre couple : il m’aide à aller au-delà de moi-même. »

Simple agacement ou vraie blessure ?

Rares sont ceux capables de discerner ce qui, dans la parole ou dans la communication non verbale, balise déjà le chemin à venir. Beaucoup préfèrent, sous couvert d’émoi amoureux, ne rien voir, ne rien interpréter des premiers signaux d’alarme. « Je me souviens de notre premier week-end avec des copains, raconte Agathe. Dans la voiture, au retour, Jacques s’est vautré sur la banquette arrière et s’est endormi, me coinçant contre la portière pendant les deux heures de trajet. Je n’ai rien dit parce que j’étais amoureuse. Pourtant, il me disait déjà à quel point sa personne allait systématiquement prendre toute la place dans notre couple. »
Dès les premiers temps, on peut se sentir blessé par un regard, un geste, une parole. Il convient alors de discerner ce qui est de l’ordre de l’agacement de ce qui relève d’une vraie blessure. S’il émiette son pain au restaurant, éclabousse le sol en prenant son bain ou laisse les portes de placards ouvertes, fermer les yeux n’engage à rien. Mais si, comme l’amoureux de Patricia, il lance avec mépris : « Ma pauvre fille, tu ne comprends rien à rien », ou si, comme Stéphane, vous découvrez incidemment que votre douce élue vote Front national, inutile d’espérer que ces atteintes à vos valeurs s’atténueront ou qu’il suffira de faire changer votre partenaire.
D’autant que nos réactions face à l’autre cohabitent avec nos propres mensonges et avec toutes les mises en scène que l’on s’impose pour répondre à ce que l’on imagine être son désir. « Isabelle avait un chien, raconte Yann. Pour la séduire, j’ai prétendu que ça ne me dérangeait pas de le sortir le matin, alors que je mets trois heures à émerger ! Je ne sais pas pourquoi je lui ai menti, mais c’est ce mensonge qui m’a conduit à rompre : je ne supportais plus de sortir cet animal. Et encore moins de m’être mis dans cette position de menteur ! » Pourtant, le "mensonge par séduction" n’est pas forcément rédhibitoire. Pour le sociologue Jean-Claude Kaufmann, il peut être le signal d’un changement : « Le paradoxe est que ce “faux” mis en avant lors de la rencontre peut produire la nouvelle vérité de l’individu s’engageant dans un couple. Le mensonge, si mensonge il y a, n’aura duré que le temps d’une transition entre deux vérités. » Il peut également préserver l’avenir, car il existe des domaines qui demandent un réel apprentissage de l’autre.
« Avec Christine, les relations sexuelles étaient “bien” mais sans plus, se souvient Alain. Comme j’étais très amoureux, je ne comprenais pas pourquoi. En fait, il a fallu trois mois pour que l’intensité de mes sentiments cesse d’inhiber ma vie sexuelle. J’avais tellement peur de lui déplaire que je ne me laissais pas aller. Si je lui en avais parlé, cela aurait pu ancrer les blocages. Il m’a suffi d’attendre qu’ils tombent. »

Un contrat implicite

Les thérapeutes sont unanimes : le vrai signal d’alarme doit se déclencher lorsque le couple se construit sur la négation du moi profond de l’un des partenaires. Hélène avait invité Marc à dîner avec des copains qui se sont décommandés. Lui, a pris cette soirée en tête à tête pour une invitation sexuelle. Hélène n’a pas osé le détromper. Coincée entre son malaise et le trouble amoureux naissant, elle a laissé faire. Le couple a duré douze ans, puis s’est séparé : « Avec le recul, j’ai l’impression de m’être laissée faire, d’avoir accepté cette emprise sur ma vie, analyse Hélène. Mon histoire d’enfance m’avait conduite à ne pas savoir m’affirmer. Bien sûr, j’ai aussi aimé Marc pour ça. Mais, pendant toutes ces années, j’ai fait énormément de choses que je n’avais pas envie de faire. Il a fallu que je rencontre un autre homme, qui m’a appris ma propre valeur, pour que j’ose être moi-même et que je puisse m’opposer à Marc. Ça a signé la fin de notre histoire. »
Pour Ghislain Devroede, chirurgien et psychosomaticien, il existe deux conceptions de l’amour. « Comme sur le divan, tout est une question de transfert. Si je prends l’autre pour ce qu’il n’est pas en espérant qu’il va me guérir, si je l’aime parce qu’il bouche un trou venu de mon histoire, il devient celui qui comblera mes manques. Et ça marchera tant que les partenaires se contenteront de cet équilibre bancal, construit sur l’instinct de mort : surtout ne pas bouger pour ne rien casser. Si, au contraire, l’autre existe par lui-même et que j’existe par moi-même, le couple est dans l’instinct de vie. Et sans doute dans la durée. »
Les étapes qui jalonnent le chemin entre la rencontre et la constitution du couple sont nombreuses : première nuit, présentation aux amis, aux familles, emménagement… Et premier conflit : « Le contrat implicite, fondateur du couple, détermine la façon dont les partenaires vont fonctionner ensemble, explique Robert Neuburger. La première crise surgit quand ce pacte fondateur est remis en question. » Il y a trois ans, Cécile est tombée amoureuse de Simon pour son côté casse-cou et baroudeur. Aujourd’hui, elle n’en peut plus. Ce qu’elle jugeait d’un romantisme absolu est aujourd’hui source d’inquiétude et de lassitude : elle agresse Simon parce qu’il roule trop vite ou fait de la varappe sans protection. « Le premier conflit est difficile à vivre, car il faut faire le deuil des vieilles valeurs et en trouver de nouvelles, poursuit Robert Neuburger. Il faut construire un nouveau couple en sachant qu’il arrive que l’un des conjoints ne suive pas. » Si cette première crise est un ébranlement du mythe fondateur, elle permet aussi de mettre à l’épreuve la créativité du couple, c’est-à-dire sa capacité à s’inventer sans cesse. A deux, bien entendu
                                         

Le syndrome de la fée Clochette

Qui sont les fées Clochette ? Des femmes brillantes, ambitieuses, qui s’avèrent aussi de grandes séductrices et manipulatrices. Eternellement insatisfaites, les Clochette cachent, derrière leur obsession du paraître et de la réussite, une grande souffrance. Et seraient de plus en plus nombreuses dans notre société. 

Elle en reçoit de plus en plus dans son cabinet : des femmes brillantes, collectionnant réussites professionnelles et conquêtes ; des hyperactives cherchant à tout contrôler, à commencer par elles-mêmes ; des « Superwoman » doublées de grandes séductrices. Au point que Sylvie Tenenbaum, psychothérapeute, les a appelées « les Clochette », en référence à la petite fée imaginée par l’écrivain James M.Barrie, avec qui elles partagent de nombreux points communs. A commencer par une grande souffrance. On connaissait le syndrome de Peter Pan, ou encore celui de Cendrillon ou de la Belle au Bois Dormant. Voici celui de la fée Clochette.

Les Clochette sont en colère

Ambitieuses, souvent arrogantes, perfectionnistes… Les Clochette sont prêtes à tout pour arriver à leurs fins. « Elles sont dans une forme de violence vis-à-vis de la vie, car elles prennent une forme de revanche, analyse Sylvie Tenenbaum. Il s’agit d’une vengeance aussi, sur une enfance où elles ont été souvent critiquées, maltraitées, humiliées, manipulées. Durant celle-ci, elles ont emmagasiné une bonne dose de colère. Et la colère, c'est de l'énergie, qu’elles vont canaliser ensuite dans la réussite professionnelle et sociale. »

Les Clochette ont peur de leurs émotions

Les Clochette ont donc beaucoup souffert pendant leur enfance. De parents toxiques, de mères possessives ou égocentriques, de pères misogynes ou absents… « Le plus souvent, elles n’ont pas eu les mêmes permissions que leurs frères, si elles en avaient, elles n’ont pas été valorisées en tant que petites filles, ou elles ont été élevées pour être les premières tout le temps. Elles se sont donc dit que pour être aimées, il fallait réussir ». Et surtout, qu’il ne fallait pas exprimer leurs émotions. Qui constituent, pour elles, de véritables faiblesses. « Elles en ont peur car elles pensent que celles-ci pourraient leur enlever leur force. Et de la force, il est vrai qu’elles en ont beaucoup ».

Les Clochette sont de grandes séductrices

Côté vie affective, les Clochette multiplient les rencontres et les conquêtes. Mais en sont rarement satisfaites. « Les hommes qu’elles rencontrent ne sont jamais à la hauteur. Et comme elles n’ont pas un caractère facile, à la moindre déception, ils sont immédiatement renvoyés. Elles ont tellement été frustrées par le passé qu’elles ne supportent pas la moindre petite contrariété.

En fait, elles méprisent les hommes, ayant pour beaucoup souffert à cause de leur père pendant leur enfance. Elles n’attendent donc d’eux que d’être adulées. » Mais en réalité, les Clochette souffrent… d’une forme de dépendance affective. « Ce sont encore des petites filles qui attendent qu'on les aime de façon inconditionnelle. Très inconsciemment, elles attendent des hommes qu’ils réparent leur vie psychoaffective. Mais cela ne peut pas marcher car personne ne pourra leur donner ce qu’elles n’ont pas reçu pendant l’enfance ».

Les Clochette se font du mal

Leur hyperactivité affective, professionnelle et sociale leur permet en tout cas une chose : ne pas penser à leur souffrance. Car si les Clochette paraissent tout réussir, en réalité, elles ont mal. Se font mal. Victimes d’elles-mêmes. « Elles ne savent pas qui elles sont. Elles ne se sont d’ailleurs jamais posé la question. Elles ne vivent que pour montrer qu’elles sont les meilleures, les plus belles, les plus fortes. Elles sont dans une forme d’ivresse. Le plus souvent, elles réalisent très tard la solitude dans laquelle elles se sont enfermées. Et prennent alors conscience de leur immense tristesse de ne pas avoir été suffisamment, ou mal, aimées ».

Les Clochette peuvent se libérer

Heureusement, les Clochette peuvent changer, « vivre mieux, avoir moins mal à l’âme ». A condition d’être aidées. « C’est un chemin difficile car il suscite de nombreuses prises de conscience. Notamment celle d’avoir fait souffrir les autres. Généralement, elles n’en sont pas fières. »
La clé de la transformation ? « La réparation de la petite fille qui est en elles et qui continue d’attendre des marques d'amour. Il est temps de la faire grandir ». De renoncer aussi à la toute-puissance, d’aller à la rencontre de ses émotions. Et surtout, « d’apprendre à mieux s’aimer, pour mieux aimer ».

                                  

Sites de rencontres : y aller ou pas

Les sites de rencontres sur Internet ont détrôné les petites annonces. Des millions de célibataires s’y bousculent chaque jour, mais certains résistent encore. Ils invoquent quatre raisons pour ne pas se lancer. Nous avons trouvé les quatre arguments contraires pour tenter l’expérience.
Cachés derrière leurs pseudos, ils sont des dizaines de milliers à rejoindre chaque jour la grande foule sentimentale du Net, en quête de quelqu’un avec qui partager son lit… ou sa vie. D’autres, plus sceptiques, rechignent toujours à intégrer la communauté des célibataires branchés sur Meetic, Match ou Netclub. Pourquoi tant de réticences ? Parmi toutes les « bonnes » raisons invoquées pour ne pas se lancer, nous en avons retenu quatre, auxquelles répondent quatre raisons, non moins valables, d’y aller quand même… ou comment changer de regard sur ce mode de rencontre des temps modernes.

1 C’est risqué…

« Je nique sur Meetic » (1) : c’est avec ce blog au titre évocateur qu’un Lyonnais de 44 ans fraîchement divorcé a tenu des milliers d’internautes en haleine, et ce grâce au récit imagé de ses ébats sexuels avec des femmes rencontrées sur le site. C’était début 2005. Depuis, Lewis Wingrove, alias Nick, a fait de son blog un livre à succès Des souris et un homme (Robert Laffont, 2005) et sans doute conforté pas mal de « clients » potentiels dans l’idée que le Net se prête davantage à la gaudriole qu’à l’amour-pour-la-vie. Soupçonnés de n’attirer que des hommes mariés en quête d’aventures, des obsédés sexuels… voire des pervers, les sites de rencontres ont hérité bien malgré eux de l’image de marque peu reluisante du Minitel rose des années 1980. Ainsi, 86 % des Français estiment que « ce n’est pas sûr, on ne sait pas sur qui l’on peut tomber » (Sondage Ifop/Meetic, octobre 2004).
« Certaines femmes qui viennent consulter me disent : “Sur Internet, il n’y a que des ringards, des tordus, je n’ai pas envie d’être harcelée” », raconte la psychothérapeute Saïdeh Reza, qui entend dans son cabinet de plus en plus de « candidats » au Net.
… Non, pas plus que dans la vraie vie : 
« De 2002 à 2004, j’ai passé deux ans à enquêter sur le sujet, et j’ai véritablement vu les mentalités évoluer, raconte le sociologue Pascal Lardellier, auteur du Cœur Net, célibat et amours sur le web (Belin, 2004). La méfiance vis-à-vis d’Internet a nettement perdu de sa vigueur : puisque l’on y fait tout, alors pourquoi ne pas y chercher aussi l’âme sœur ? Aujourd’hui, tout le monde connaît au moins une personne qui a tenté l’expérience. »
Chercher un amoureux derrière son écran semble moins tabou, puisque l’on y croise monsieur et madame Tout-le-Monde. La quête de l’amour virtuel devient un sujet de conversation avec les collègues ou entre copains. « J’imaginais que l’on n’y trouvait que des hommes de second choix, ou encore des hommes douteux. Eh bien c’est vrai, il y en a, mais il y a aussi des hommes très bien », assure Myriam, 43 ans. Sur ces sites, les célibataires trouvent finalement ce qu’ils viennent y chercher, comme dans la vraie vie : des aventures, et des relations plus sérieuses.

2 C’est la honte…

« J’entends souvent cette réflexion : “Je suis pas mal, je suis bien dans ma peau, qu’est-ce que j’irais faire sur Internet ? Je ne suis pas tombé si bas…” Elle démontre une résistance narcissique importante », analyse Saïdeh Reza. Le Net apparaît comme la bouée de sauvetage, le dernier recours, l’ultime solution, parfois douloureuse pour l’image de soi. Beaucoup reconnaissent son efficacité, mais surtout pour les autres…
« C’est l’idée du “Je n’ai pas besoin de ça”, la peur de passer pour un handicapé relationnel », commente Pascal Lardellier. Malgré le formidable battage médiatique orchestré autour du Net sentimental, certains ont encore des scrupules à rejoindre la confrérie douteuse de ces « désespérés de l’amour », réduits à pianoter derrière leur écran dans l’espoir de trouver enfin chaussure à leur pied. Ceux qui franchissent le pas ne peuvent s’empêcher de se justifier : « Il faut bien vivre avec son temps », « Ma meilleure amie a tellement insisté », etc. Une manière comme une autre de démystifier la recherche, d’y introduire de la légèreté en se persuadant que l’on y va « juste pour voir »…
… Non, c’est être honnête avec soi-même :
« Il y a quelque chose de l’ordre de l’interdit, du surmoi, analyse le psychanalyste Loïck Roche, auteur d’In Bed With the Web (avec Yannick Chatelain, Chiron, 2005). C’est une transgression importante de sa propre image, qu’il faut parvenir à dépasser. C’est un peu la même démarche qu’une personne qui s’autorise à aller faire une psychanalyse, il faut d’abord qu’elle accepte le fait qu’elle a besoin d’aide. »
« Les célibataires endurcis se font souvent une vie en solo remplie d’activités, ils se convainquent qu’ils n’ont pas forcément besoin de quelqu’un. S’inscrire sur un site de rencontres, c’est revenir sur cette assurance », explique la psychologue Sabrina Philippe, qui dispense des conseils personnalisés aux membres du site Parship. Aller sur Internet, c’est reconnaître un manque, arrêter de se mentir à soi-même. Cette prise de conscience ne peut être que bénéfique et n’exclut pas d’avoir par ailleurs une vie sociale digne de ce nom.

3 Je ne vais intéresser personne…

A l’idée de remplir leur fiche signalétique sur Internet, certains ont l’impression de se brader, d’autres, au contraire, de surestimer leurs capacités de séduction. « Certains me disent : “Je ne vais intéresser personne, je ne sais pas écrire”, raconte Saïdeh Reza. C’est un problème plus féminin que masculin. Les hommes ont moins de scrupules à mettre leur photo, alors que les femmes ne se trouvent pas photogéniques et ont souvent tendance à se dénigrer. » Même s’il est fréquent de se rajouter quelques centimètres, de se délester de quelques kilos, de quelques années, ce face-à-face avec soi-même est parfois pénible." Les gens ont le fantasme d’y aller incognito, et ils sont renvoyés à quelque chose de très basique : leur physique, leurs fautes d’orthographe " commente Loïck Roche.
… Au contraire, c’est bon pour l’ego : 
Une fois franchi le cap de l’inscription, le site de rencontres devient souvent un formidable vecteur de confiance en soi, un booster d’ego qui rend accro. « Je suis resté sept ans avec ma copine, alors j’avais besoin de voir si je plaisais toujours, raconte Mike, 34 ans. C’est vite devenu une drogue. Chaque soir, je m’arrête dans un cybercafé pour voir si j’ai de nouveaux messages. Pour moi, c’est comme une petite thérapie. »
« Beaucoup de membres nous disent : “Sur votre site, je n’ai peut-être pas trouvé la personne que je cherchais, mais j’ai repris confiance en moi” », explique Sabrina Philippe. Paradis des timides ou des déçus de l’amour, Internet permet de rentrer en douceur dans le grand jeu de la séduction, de réapprendre à parler d’amour sans prendre trop de risques. « Je peux parler de tout sans rougir, raconte Samantha, 19 ans. Si quelqu’un ne me plaît pas, je le zappe tout de suite, il me suffit de cliquer sur la petite croix sans avoir à me justifier. » « Sur Internet, c’est moins dur de perdre la face », commente Pascal Lardellier.

4 C’est un « tue l’amour »…

« Cette soirée, j’y suis vraiment allée en traînant les pieds, et puis je suis entrée et je l’ai vu… » La rencontre amoureuse, celle de nos rêves d’enfants ou des contes de fées, est toujours due au hasard. Difficile ensuite de se dépêtrer de ces rêveries un brin fleur bleue pour aller « se vendre » sur la Toile. « J’espère que je ne serai jamais amenée à rencontrer quelqu’un par Internet, explique Anita, 21 ans. Tous les jours, on peut rencontrer un tas de gens, rien qu’en allant au boulot. Où sont passés les rêves de rencontres insolites, comme le coup de foudre pour le conducteur de la voiture que l’on vient d’accrocher ? »
Avec sa fiche d’inscription aux allures de fiche produit, Internet nous ramène à la réalité d’une manière un peu trop crue : 60 % des Français stigmatisent d’ailleurs le Net comme « peu romantique » (Sondage Ifop/Meetic, octobre 2004). « Les relations humaines ne sont pas une marchandise de supermarché, souligne Krystel, 38 ans. Je ne suis pas un produit avec une date limite de fraîcheur, que l’on évalue, achète, jette, teste et échange quand on n’en veut pas. » Certes, la variété de ce « supermarché amoureux » peut sembler grisante au premier abord, mais trop de choix tue parfois le choix…
« Sur le web, il y a tellement de possibilités que cela ne donne pas envie de faire d’efforts pour quelqu’un, de prendre des risques, commente Alain, 36 ans. Si ça ne marche pas, on se dit que l’on retrouvera vite quelqu’un d’autre. Finalement, toutes les filles deviennent interchangeables. »
… Non, c’est un vrai lieu de rencontres :
Avec des millions d’abonnés aux quatre coins du monde et un taux de renouvellement impressionnant (Meetic compte par exemple près de quatorze millions d’inscrits dans treize pays d’Europe et plus de vingt-trois mille sept cents nouveaux inscrits chaque jour (source Meetic, 2005), ces sites sont une formidable opportunité de rencontrer des gens différents, qui n’auraient jamais croisé notre route dans la vraie vie. Et si les marivaudages virtuels sont parfois jugés peu romantiques, ils ne sont qu’un prélude à la vraie rencontre, avec ses déconvenues ou ses papillons dans le ventre. Le Net permet juste de baliser un peu le terrain. « On n’a pas envie de se vendre, de faire l’article de soi-même, et pourtant, dans la vie, nous le faisons aussi, remarque la psychothérapeute Saïdeh Reza. Ce qui dérange, c’est que, sur le web, cela se fait de façon plus ostensible, plus consciente. »
Plutôt que de rêver à un hypothétique prince charmant, pas toujours pressé d’arriver, Internet ramène à l’ici et au maintenant. « Introduire de l’efficacité dans la rencontre amoureuse dérange, mais c’est aussi une manière de reprendre sa vie en main, assure Cécile Moulard, directrice du marketing de Meetic. C’est ce que j’appelle la “Meetic attitude”, c’est-à-dire la possibilité de trouver quelqu’un sans peser sur sa famille ou ses amis, de reprendre le contrôle de sa vie. Ecrire des messages à des inconnus, c’est également une façon de s’écrire à soi-même, de mieux comprendre ce que l’on recherche. » S’inscrire sur un site de rencontres, c’est bien souvent remettre en question l’image que nous avons de nous-même, la vision que nous avons de l’amour… mais cela peut aussi devenir une chance de se confronter à soi-même, à ses désirs profonds… et plus si affinités.

Les inscrits

Combien sont-ils ?
Selon différentes estimations, quatre millions de personnes seraient inscrites sur des sites de rencontres en France, sachant que l’on compte entre huit millions et dix millions de célibataires.
Qui sont-ils ?
A l’époque de leur lancement, ces sites attiraient surtout les catégories socioprofessionnelles favorisées. Aujourd’hui, le phénomène a gagné quasiment toutes les couches de la société.
Quel âge ont-ils ?
Les 28-40 ans représentent le cœur de cible, mais les seniors commencent à s’y mettre. A titre indicatif, chez Meetic, 32 % des inscrits ont entre 18 et 24 ans ; 42 % entre 25 et 34 ans ; 21 % entre 35 et 49 ans ; et 5 % plus de 50 ans.

Portrait psy

Le facteur psy devient un allié de taille dans la quête de l’amour virtuel. Nouveau site « de rapprochement amoureux par affinités psychologiques et sociologiques » lancé en novembre dernier, Ulteem by Meetic explore ainsi pas moins de soixante et onze critères.
Objectif : dresser de vous un portrait d’une précision quasi chirurgicale pour trouver celui ou celle qui vous correspond le mieux. Une précision également de mise sur Parship, avec un test de personnalité, une analyse psychologique et unaccompagnement individuel par une psychologue. Au tarif de cent quarante-neuf euros les six mois, l’amour n’a plus grand-chose à voir avec le hasard…
• ulteem.meetic.fr
• www.parship.fr
               

  Internet, le choc du premier rendez-vous

Ils “chattent”, débattent et se livrent en toute franchise… sous couvert d’anonymat. Jusqu’à ce que l’envie de se voir “pour de vrai” prenne le dessus. Du virtuel au réel, un pas qui réserve parfois des surprises.
 Pilou à Nikki2 : “Deux semaines qu’on chatte : si on tchatchait, un de ces quatre… autour d’un café ?”. Quelques secondes plus tard : De Nikki2 à Pilou : “OK ! Où ? Kan ? Koman ?” 
C’est rapide, efficace. Le surfeur choisit un forum, se mêle aux interlocuteurs, avant de repérer celui ou celle qui l’intéresse et de cliquer sur son nom pour un dialogue en "tête à tête". « Quand on arrive sur un forum, on distingue très vite la personne avec laquelle le courant passe le mieux », affirme Nelly, une célibataire de 33 ans qui doit ses deux dernières expériences amoureuses à son ordinateur. Quelques lignes échangées, bientôt des lettres envoyées par mail, puis des photos, parfois des sons : ce jeu de découverte entre internautes peut durer plusieurs mois avant qu’un rendez-vous soit pris dans la "vraie vie".
« Pour moi, le Net, c’est l’étape des présentations », confirme Patrick, 42 ans. Pressé d’en finir avec son célibat mais trop "occupé" pour se chercher une amie, ce graphiste sur Internet ponctue régulièrement son temps de travail par des visites sur les sites de rencontres. « Et dès que je sens que l’autre a des chances de me plaire, je propose un rendez-vous. »

Les hommes avantagés

Dans un café, au pied de la tour Eiffel ou au musée du Louvre, le lieu de la première rencontre est choisi en fonction des intérêts partagés par les deux "pseudos" et de la dimension plus ou moins romantique qu’ils veulent donner à leur face-à-face. « Mais toujours dans un lieu public », avoue Coralie, 31 ans. Cette journaliste célibataire sait, par expérience, que l’anonymat du Net ne favorise pas que les bonnes surprises : « Il y a quelques mois, j’ai “chatté” avec un type très sympa, passionné d’art grec comme moi. On a discuté sur le forum jusqu’à 3 heures du matin. Le lendemain, on se retrouve pour boire un café et là, à peine assis, il sort de sa poche la clef d’une chambre d’hôtel et me lance : “J’ai réservé juste à côté pour une heure. Faut pas traîner !” Je l’ai traité de malade et je suis partie. J’étais anéantie. Je m’en voulais vraiment de m’être fait avoir à ce point. »
Tous ceux qui se promènent sur la Toile ne sont pas aussi "directs". Seulement, comme le remarque le sociologue Philippe Breton (auteur du Culte de l’Internet. Une menace pour le lien social ?, La Découverte, 2000), « à l’instar de tout média indirect, Internet favorise la ruse, ce qui avantage surtout les hommes ». Les femmes, elles, restent plus idéalistes dans leur quête d’amour virtuel. A 43 ans, Joëlle a longtemps espéré trouver son second mari grâce au "chat". Elle s’est finalement retirée du jeu, après plus de dix rencontres avec des internautes : « Une fois que l’on se retrouvait dans la réalité, leur seul but, c’était le sexe. » Une caractéristique que cette mère divorcée attribue tout autant aux hommes "non virtuels", « mais c’est beaucoup plus décevant et blessant quand, pendant des semaines, un type nous a laissé croire qu’il avait d’autres intérêts ».

Du fantasme à la réalité

Aucune précaution ne suffit à éliminer l’appréhension du premier face-à-face. Plus l’heure de la rencontre approche, plus la certitude de connaître l’autre et d’être connu de lui s’estompe. Michel a dialogué pendant six mois avec Jennifer, avant de prendre son billet pour Washington et découvrir son vrai visage : « On avait pris le temps de rentrer dans une relation profonde. Je connaissais tout de ses goûts, j’avais reçu des dizaines de photos d’elle, et vice versa… » Il partait donc en terrain conquis. « Mais quand j’ai atterri aux Etats-Unis, j’étais terrorisé ! En fait, je me sentais comme avant n’importe quel premier rendez-vous ! Pire : je me devais d’être à la hauteur de ce qu’elle attendait de moi. » Deux semaines plus tard, il rentrait à Paris… célibataire : « On connaissait tout l’un de l’autre, tout, sauf notre façon de vivre au quotidien… Et là, ça n’a vraiment pas collé. »
« La rencontre réelle, c’est une deuxième rencontre, explique Joëlle. Une autre histoire commence et annule tout de celle débutée sur le Net. » Pour Jacques Salomé, psychosociologue, écrivain et spécialiste de la communication, il ne faut pas confondre rencontre et relation : « Sur Internet, on fait des rencontres mais on n’établit pas de relations. Pour créer une relation, il faut se confronter à la réalité afin d’actualiser et valider les informations échangées dans le virtuel. La rencontre permise par Internet est une rencontre irréelle constituée d’un ensemble de projections : on projette sur l’autre nos peurs, nos désirs, nos attentes… »
Or, entre cet être irréel et l’individu qui apparaît "en chair et en os", le décalage est immense, et la déception presque inévitable : « Toutes ces premières rencontres ont été un cauchemar ! avoue Philippine, 22 ans. J’avais tellement fantasmé sur leur intelligence, leur beauté, leur gentillesse que même le meilleur ne pouvait être à la hauteur. J’étais “condamnée” à être déçue. » Philippine n’a pourtant pas décroché du Net. Elle s’interdit seulement de trop en attendre. « Il y a deux mois, j’ai rencontré un Lyonnais sur un forum : l’entente parfaite. Il est monté à Paris, et quand je l’ai vu… Vraiment pas un canon. Mais on a sympathisé, et on est devenu très bons amis. »

Un tremplin pour la relation amoureuse

Mais deux êtres virtuels qui se rencontrent, cela peut aussi donner de véritables idylles. Seulement à en croire le sociologue Philippe Breton, ces succès doivent davantage au hasard qu’à la communication établie sur le web : « Les internautes se seraient rencontrés dans un autre contexte, ils se seraient de toute façon aimés. » D’après lui, ces sites de rencontres ont donc pour seul intérêt de faciliter la mise en relation de personnes qui, du fait de leur timidité ou de la distance qui les sépare, n’auraient jamais eu l’opportunité de se rencontrer dans la réalité. Ensuite ? « S’ils construisent une histoire autour de leurs écrits, tant mieux… Mais qu’ils en restent là ! »
Paul Soriano, sociologue, coauteur, avec Alain Finkielkraut, d’Internet, l’inquiétante extase (Mille et Une Nuits, 2001) et auteur de Mille milliards de mails (Cahiers de l’Irepp, septembre 2002), confirme. Pour lui, le principal avantage du Net est d’avoir réintroduit le principe de « l’écriture amoureuse grand public » : « On insère de la littérature – donc de la fiction – dans sa relation à l’autre. » Mais pour ceux qui, au contraire, veulent du "concret", « qu’ils prennent vite rendez-vous avant de trop s’illusionner ! » conseille Philippine. Car même dans la réalité, ce n’est qu’à la deuxième, voire la troisième rencontre que les masques finissent enfin par tomber, et les « pseudos » par céder la place aux individus.
« Au bout de notre troisième rendez-vous, j’ai presque complètement oublié “Lancelot” et j’ai découvert Pierre, confie Claire, 26 ans. C’était comme son frère jumeau. Dans la réalité, il était forcément moins parfait, moins lisse, mais plus attirant, pour ces mêmes raisons. Ensuite, une fois que l’on se plaît et que l’on se fréquente dans la “réalité”, cela se passe comme dans n’importe quelle autre rencontre. On ne parle plus alors de la relation virtuelle, sauf pour se promettre que l’on n’ira plus se balader sur les sites de rencontres. »

Agence matrimoniale ?

Grâce à la facilité des contacts et à la rapidité des échanges, le réseau Internet est devenu en quelques années la plus grande agence matrimoniale du monde. Parmi les leaders, Meetic.com se targue d’avoir déjà enregistré sept cent mille inscriptions depuis son lancement européen en avril dernier.
Pour la France, le portail Yahoo référence dans sa rubrique « Rencontres » une bonne cinquantaine de sites. Netclub.com, le pionnier français, a reçu en octobre quelque un million sept cent mille visites (source Cybermétrie). Depuis le début de cette année, notre site Psychologies.com diffuse lui aussi des annonces. Un nouveau point de rencontre pour les amoureux du « mieux vivre sa vie ». 
(Martin Rubio)

L’avis du psy

Serge Tisseron, psychiatre : « Internet ne met pas fin au rêve de l’âme sœur »
Psychiatre, auteur de L’Intimité surexposée (Hachette, 2002 ), il voit en la rencontre sur Internet une expérience autre.
Psychologies : Le web n’incite-t-il pas à une approche plus “consumériste” de la relation amoureuse ?
Serge Tisseron : Je ne crois pas que ce "zapping" mette forcément fin au rêve. Ce n’est pas parce que l’on multiplie les expériences que l’on cesse de croire à l’âme sœur. En fait, Internet a deux effets possibles : l’accroissement du romantisme – « L’âme sœur existe, en Chine, aux Etats-Unis ou ailleurs, donc il me faut la trouver » ; ou la banalisation : « Je ne crois pas en l’amour, donc je vais multiplier les expériences légères. »
Internet ne rend donc pas plus cynique ?
Non. Internet n’invente pas une attitude, il permet plutôt aux composantes de la personnalité de chacun de s’y affirmer de façon plus marquée. Les cyniques peuvent se comporter davantage comme tels en jonglant avec les rencontres, les phobiques demander plus de précisions à l’autre et prendre le temps de se familiariser, les entreprenants être encore plus directs…
                                               

Sites de rencontres : le fantasme de l'amour idéal


L'âme soeur existe forcément quelque part... C'est en tout cas ce que nous promettent les sites de rencontres. Dix ans après leur apparition, le sexothérapeute et psychanalyste Alain Héril décrypte comment Meetic et ses avatars - Adopte un mec, Attractive World, Parship, eDarling...- ont influencé notre vision de l'amour.
Dix ans après la naissance des premiers sites de rencontres, l’adhésion est toujours massive, et la performance de ces « serveurs du coeur », désormais indiscutable. Partout, des amoureux ravis témoignent, en nombre, de leur bonheur : « J’ai trouvé l’amour de ma vie. On a discuté deux, trois jours avant et, depuis notre rencontre, on ne s’est plus quittés et ça n’arrivera jamais » ; « Bientôt deux ans que nous nous sommes rencontrés via Meetic… Le coup de foudre immédiat dès notre première rencontre. Nous ne nous quittons plus, nous nous aimons plus que tout… »
Si nous rapportons toutes ces histoires d’amour aux chiffres des unions effectives nouées en ligne, nous ne sommes que dans l’écume : leur impact dans notre inconscient collectif est bien plus profond. Internet a radicalement changé notre façon d’envisager la rencontre et le discours amoureux, que nous soyons inscrits ou pas sur les réseaux.

Un clic : la quête de l’être idéal

Pour Alain Héril, sexothérapeute et psychanalyste, auteur, notamment, de Femme épanouie, avec le progrès numérique, notre société fait marche arrière : « En mai 1968, hommes et femmes ont dénoncé le couple comme objet d’oppression sociale. En réaction, ils voulaient bâtir, à égalité, des histoires où chacun aurait la place d’évoluer auprès de l’autre, où le risque d’échec était assumé. Les sites de rencontres ont changé cela. Par le biais d’Internet, nous sommes revenus à une image fixe de l’amour. Dans mon cabinet, je constate que mes patients sont de plus en plus victimes du mythe de l’amour. Les femmes, en particulier, recherchent un homme idéal, leur double masculin. »
Que l’on s’inscrive ou pas sur les sites, le mythe du prince charmant ou de l’âme soeur a repris de plus belle dans nos inconscients. Nora, 32 ans et un enfant, désespère de son célibat : « Il n’y a donc personne qui me convienne ? Je ne suis pourtant pas difficile… Il doit avoir le même niveau de vie que moi, être dans ma tranche d’âge, me faire rire et montrer quand même un peu de prestance. Je n’ai aucun critère physique : brun, blond, tout me va. Mais il faut tout de même qu’il soit plus grand que moi, un mètre quatre-vingts au minimum. »

Nora assure « ne pas demander la lune ». Pourtant, il y a toujours un détail qui l’arrête : « C’est un trait physique ou une manière de parler qui ne me donne pas confiance. » Malika, 37 ans, vient de trouver son « âme soeur » sur un réseau de rencontres. « Avant, mes critères étaient trop restrictifs. Je ne voulais pas d’un Maghrébin. J’avais trop peur de tomber sur un “blédard”, qui me renvoie dans des schémas contre lesquels j’ai lutté toute ma vie. » À 37 ans, la jeune femme d’origine algérienne s’est résolue à élargir ses critères de recherches. Nouvelle solution, nouvel espoir : « Je viens de faire la connaissance de Lalou. C’est “lui”. Nous avons le même humour, les mêmes goûts, les mêmes souvenirs d’enfance… C’est comme si nous nous étions toujours connus ! »

Un profil : une infinité de fantasmes

Nora et Malika calibrent leur demande en fonction d’elles-mêmes. « Elles ne sont pas tournées vers l’“autre” », confirme Alain Héril. Comme elles, de plus en plus d’entre nous, en couple ou pas, prennent le risque de « jeter » l’autre au moindre accroc. Les sites de rencontres nous font miroiter qu’un remplaçant nous attend au coin d’une case à cocher sur Internet. Ils semblent offrir une infinité de possibilités à nos fantasmes. Nous ne franchissons certes pas tous le pas de nous inscrire. Pourtant, beaucoup d’entre nous sont gagnés par « la montée actuelle de l’impatience, cette impossibilité de supporter la frustration ou la déconvenue, commente Alain Héril. C’est inquiétant, car cela devient parfois une source de souffrrance ».
Dans ce marché de l’offre et de la demande, le renversement des rapports de forces est radical : pour la première fois de leur histoire, les femmes ont à leurs pieds une immense cour de prétendants qui doivent tout faire pour les séduire. « Meetic est un harem pour femmes, constate Alain Héril. Nous pourrions croire que les hommes viennent pour le sexe et les femmes, pour le sentiment. C’est souvent l’inverse. Mais, pour un homme, il est quasiment impossible d’avancer sur le terrain de la sensibilité en restant audible. » Difficile d’avouer une calvitie naissante, un âge avancé ou des revenus trop faibles. Du coup, ils mentent, alimentant les ressentiments féminins.
Éléna, 32 ans, est une adepte du site Adopteunmec.com. Sans états d’âme et sans culpabilité : « Moi, les mecs, je les aligne et je les shoote », lance-t-elle. Elle a souffert de ses relations précédentes et utilise les sites de rencontres pour rendre leur pareille aux garçons. « Pour une femme, poursuit le sexothérapeute, c’est un lieu où le désir est excité autant par le besoin de plaire que par la colère. » Une façon d’être avec les hommes qui, les jeunes gens en témoignent, gagne du terrain et crée, dans les relations hommes-femmes, un déséquilibre inédit.

Un pseudo : le règne du mensonge

Nora mène de front des relations – non sexuelles – avec deux amoureux : « Impossible pour l’instant de savoir celui qui me plaît le plus, j’attends de voir comment ils se comportent, s’ils n’ont pas menti, s’ils sont vraiment disponibles, lequel est le plus empressé. Et, bien sûr, je continue à consulter mon compte, au cas où the one apparaîtrait. » « Ces sites hystérisent nos relations, analyse Alain Héril, ils sont par excellence une promesse de sexualité sans le passage à l’acte, ce qui est la définition même de l’hystérie en psychologie. Certaines de mes patientes se mettent dans un état d’agressivité très proche de l’état d’excitation sexuelle. Ce qu’elles veulent, c’est avant tout jouer avec le désir de l’autre. » Elles choquent, elles provoquent.
« Cette absence de charge érotique est frappante dans les couples Meetic, poursuit Alain Héril. Il arrive souvent qu’ils ne parviennent pas à une relation sexuelle épanouie. Beaucoup d’internautes sur les sites de rencontres investissent leurs avatars de toute leur puissance sexuelle, ce qui revient à dire qu’ils s’en départissent. »
Un jeu de dupes, car, lors du retour à la réalité, la confrontation avec l’autre ne peut être que décevante : devant un corps imparfait, avec ses aspects disgracieux, confrontés au son de sa voix, à ses odeurs, nous sommes face à la désillusion, démunis de nos ressources pour recréer l’alchimie, le désir. « L’image fantasmée de l’autre est devenue immense et a pris toute la place. La dimension érotique se réduit à la portion congrue des tris sur Internet. » Le corps est comme endormi. Un peu comme celui de la Belle au bois dormant qui attend son prince charmant…

                                              

Peut-on être célibataire et heureux ?


Ils sont de plus en plus nombreux à être seuls. Certains, par choix. D’autres pas. Aujourd’hui, les célibataires démontrent qu’il est possible d’exister et de s’épanouir en dehors du sacro-saint couple. Mais ils doivent lutter contre une pression sociale et familiale à vivre à deux qui demeure très forte. Sans compter celle qu’ils se mettent parfois à eux-mêmes.
« Mon existence en solo, je la vis pleinement. J’ai envie de refaire ma vie, mais pas à n’importe quel prix », explique Christelle, 35 ans, mère-célibataire divorcée depuis deux ans. « Je profite des variantes de l’amour : la tendresse que je trouve auprès de ma famille et de ma fille, la complicité que je partage avec mes amis… » À l’heure où le mariage n’est plus un passage obligé, où la vie de couple se pense davantage en CDD qu’en CDI et où la société se fait de plus en individualiste, nous sommes tous amenés à connaître des périodes de célibat. Fini le temps où les Catherinettes étaient raillées et les vieux garçons tournés en ridicule. Aujourd’hui, les célibataires s’assument et certains n’hésitent pas à vanter les mérites de la vie en solo. Sans en faire pour autant un projet de vie.

Des célibataires épanouis

Parmi les solos, ils sont nombreux à prouver qu’il est possible d’exister et de s’épanouir en dehors de la vie de couple, qui est souvent loin d’être un long fleuve tranquille. Lui préférant, un temps au moins, le célibat. Pour Léa, 41 ans, vivre seule est un choix. « Je ne me marierai pas, j'ai vu trop de désastres autour de moi. En revanche, je ne dis pas que je ne craque pas de temps en temps. Avoir un compagnon de route est appréciable, mais pas à temps plein. » D’autant que les femmes, qui ont acquis leur indépendance financière, ont maintenant ce choix.
Exit l’image du célibataire malheureux et laissé pour compte. Place à celle d’un célibat qui peut être source d’épanouissement. La clé ? « Se fréquenter soi-même, être davantage à son écoute, répond Dominique Contardo-Jacquelin, psychothérapeute. S’interroger sur ce qui me ferait plaisir, sur les personnes que je pourrais rencontrer… » Et aussi, trouver d’autres domaines de réalisation de soi que le couple : professionnel, artistique, associatif, sportif… Mais les célibataires ont beau prouver qu’exister autrement qu’à deux est possible et jouir d’une image plus positive qu’avant, ils continuent de déranger.

Le couple reste la norme

Isabelle a 37 ans. Elle est aujourd’hui seule et sans enfant. « Lors des réunions familiales, je génère de l’indifférence ou de la gêne. Au travail, j’essuie toutes sortes de remarques. Auparavant, cela me faisait bondir. Maintenant, j’essaye de me détacher de ce miroir qu'ils projettent sur moi et qui n'est en rien mon reflet. » Aujourd’hui encore, on continue d’attendre du célibataire qu’il trouve un jour sa moitié. Si possible avant d’avoir atteint la trentaine, décennie fatidique pour tous ceux qui ne sont pas encore « casés ». Quant aux quadras et quinquagénaires séparés, il leur revient de tourner rapidement la page et de retrouver quelqu’un sans tarder. « La pression est en fait beaucoup plus insidieuse, explique Florence Maillochon, sociologue et chargée de recherche à l’Ined. Nous sommes élevés dans une idéologie très libre, régie par le culte de l’individualisme. Il n’y a plus d’obligation à former une famille traditionnelle. Mais l’incitation à être en couple demeure très lourde. »
Médias, publicités, sites de rencontre… Partout, c’est l’apologie du couple, qui, dans notre société soi-disant décomplexée, reste la règle. C’est un signe de socialisation et, il faut l’avouer, une façon de se rendre l’existence plus confortable : pour affronter la vie et ses épreuves, pour acheter une maison, partir en voyage, ou tout simplement, aller à l’hôtel, mieux vaut être deux. Dans un monde où tout est conçu pour les couples, « il est difficile d’être seul, ajoute Jean-Michel Hirt, psychanalyste. Beaucoup de gens sont convaincus, et je crois, à juste titre, que la grande aventure d’une vie est une histoire d’amour. C’est ce qui est le plus exaltant. »

Célibataire et heureux ?

En couple, se dit-on, il y a cette joie de pouvoir échanger, partager ensemble. « Le jour où je me suis mariée, je me suis sentie soulagée, raconte plumedepaon, notre psychonaute. Je ne m’imaginais pas pouvoir être heureuse autrement. » La vie à deux, une condition au bonheur ? Pour Jean-Michel Hirt, « cette aspiration au couple vient de l’enfance. Si ses parents ne s’entendaient pas, on rêve d’avoir une compensation à l’âge adulte. Sinon, on cherche à revivre quelque chose de bon. » Même si nous passons par des périodes de célibat, notre idéal serait donc de trouver quelqu’un avec qui avancer, se construire…
« Mais le diktat du couple n’existe plus, analyse Dominique Contardo-Jacquelin. Le couple est l’une des facettes de la construction de l’identité. Aujourd’hui, chaque individu est autorisé à devenir lui-même, sans pour autant être en adaptation avec quelqu’un d’autre. Pendant longtemps, les femmes se sont définies par rapport à leur mari. Aujourd’hui, c’est terminé. Chez de plus en plus de personnes, on retrouve une exigence fondamentale : devenir soi, définir ses goûts, faire des choix… Soi-même. Et non en fonction d’un autre ». Et si bien vivre son célibat, cette occasion privilégiée de se réaliser en se retrouvant en tête à tête avec soi-même, était le meilleur moyen de retrouver, par la suite, plus facilement l’amour ?

Le célibat, une période transitoire ?
Novembre 2009. « Nouveau départ », le Salon du divorce, de la séparation et du veuvage se tient pour la première fois à Paris. Objectif : permettre aux futurs et actuels divorcés de réussir leur séparation. Et surtout, de refaire leur vie. Clubs de rencontres, coaching en tout genre -relooking, déco-, agence proposant des voyages en solo… Après la séparation, un nouveau mariage ? Tout semble inviter ces célibataires à ne surtout pas le rester trop longtemps.

Témoignage : « Je me suis découverte d'assez bonne compagnie »

Eva, 36 ans, s’est mariée à 28 ans. Il y a trois ans, elle se sépare du père de ses enfants. Ils ont divorcé depuis un an.
« Au début, j'étais complètement perdue. Je n'avais jamais vécu seule. L'idée d'aller me coucher et de vieillir sans personne à mes côtés m'angoissait. Les premiers à avoir fait pression sur moi, ce sont mes enfants, mon fils de cinq ans en particulier. Le fait que je sois seule le tracassait. Il voulait absolument que j'aie un amoureux, quelqu'un qui m'aime. Cela m'a beaucoup touchée et, bizarrement aussi, beaucoup déculpabilisée. Je m'inquiétais pour eux, ils s'inquiétaient pour moi. Nous en avons beaucoup discuté ensemble. Aujourd'hui, ils n'y trouvent pas la même urgence. Je suis très bien toute seule et ils l'ont compris.
Maintenant, c’est mon entourage qui s'alarme. C'est vrai que les premiers mois, la première année, on pouvait bien me l'accorder, mais trois ans, cela commence à faire long. Régulièrement, on me demande si j'ai rencontré quelqu'un, on cherche à me présenter un homme. Je dis "non merci", je ris, je dis que je n'ai pas le temps.
Avant, j'avais « le fantasme de la famille Ricorée ». C'est terminé. Il me faut trouver un nouveau modèle. Mais je ne suis pas tentée par celui de la famille recomposée. Je me suis habituée à la garde alternée : une semaine avec les enfants, tous les trois ; puis une semaine toute seule, en célibataire. Parfois, je sors, parfois, je goûte simplement ce plaisir inédit du silence, de la solitude. L'idée de partager mon lit ne m'inquiète pas. Celle de laisser quelqu’un entrer dans mon quotidien ne me plaît guère, je dois le reconnaître. C'est ce qui choque les gens, je pense. Ils ne me croient pas.
Pour moi, ce célibat n’est évidemment pas un projet de vie. Mais c'est un fait auquel je me suis habituée, auquel j'ai pris goût. Je ne voudrais pas que l'on envahisse cet espace de pure liberté. Parfois, je suis un peu troublée de constater à quel point je vis bien cette solitude. Je me demande même si je n’ai pas perdu la capacité d'aimer. Mais je ne crois pas. Je ne me suis pas renfermée. J'ai une vie bien remplie, dans laquelle je me réserve aussi des temps d’inactivité. Au fond, il est là le grand gain. C'est à cela que je ne suis pas prête à renoncer. Vivre avec quelqu'un - en tout cas pour quelqu'un comme moi -, c'est vivre sans cesse avec l'idée de l'autre, de ses envies... Je me demandais toujours ce qui allait lui plaire. Aujourd’hui, j’ai découvert mes propres goûts, mes limites. Je me sens très libre, très forte. Finalement, je me suis découverte d'assez bonne compagnie. »

                                        

Pourquoi c’est si bon d’être amoureux


C’est lui, c’est elle. Nous sommes éblouis, émus, béats, en transe. Et si l’état d’amour n’était dû qu’à un subtil dosage d’ingrédients, une simple affaire de molécules et d’inconscient ? Enquête dans les laboratoires de l’alchimie amoureuse.
stostérone, ocytocine, lulibérine, endorphines… Toutes ces molécules, libérées à grands flots lors de la rencontre amoureuse, nous font planer, désirer, jouir, oser. Aucun amoureux n’échappe à la révolution hormonale qui transforme son organisme en un véritable petit labo de chimiste confirmé.
« Nous sommes programmés pour être dépendants à l’autre, aveuglés par l’amour, car nous sommes conditionnés par le besoin », explique Michel Reynaud, psychiatre et professeur de psychiatrie, spécialiste des addictions.
Besoin de fusionner, de faire le plein de plaisir physique et de sécurité affective. Tout commence avec la testostérone, l’hormone du désir sexuel, produite par les hommes et par les femmes. A cette production succède celle de lulibérine, l’hormone libérée au début de la relation sexuelle. C’est elle qui pousse à rechercher toujours plus de contact et de caresses.
Vient ensuite l’explosion d’endorphines au moment de l’orgasme, qui modifie radicalement l’état de conscience ordinaire : euphorie ou extase, ces molécules nous font décoller. Mais en même temps que les sens et la conscience s’affolent, nous produisons de l’ocytocine, l’hormone de l’attachement. Et c’est ainsi que le plaisir devient amour. « Toutes ces hormones qui travaillent en surrégime produisent de la dopamine, qui booste ce que l’on appelle le “circuit de la motivation”, poursuit Michel Reynaud. C’est la dopamine qui nous pousse à agir, à oser, à relever des défis. »
C’est aussi sa chute, générée par l’absence ou l’abandon de l’objet d’amour, qui nous fait des nœuds à l’estomac, nous déprime plus ou moins sévèrement selon notre structure psychoaffective et notre capacité à gérer le manque.

La rencontre de deux inconscients

On sait aussi, grâce à la psychanalyse, que l’alchimie amoureuse ne doit rien au hasard, mais qu’elle naît de la rencontre de deux inconscients qui se choisissent. Une gestuelle, une voix, un grain de peau, une façon de dire ou d’être viennent réveiller ce qui sommeillait au plus profond de nous et réactiver à notre insu notre mémoire affective la plus ancienne, celle de nos premiers liens.
« Dans l’état amoureux, nous vivons une forme de régression qui réactive le premier lien affectif fusionnel – avec la mère – ou, au contraire, le répare s’il a été défaillant », explique Marie-Laure Colonna, psychanalyste et philosophe.
En état d’amour, la réalité ordinaire se dilate, toutes les portes – en soi et autour de soi – semblent s’ouvrir, les émotions s’intensifient, la banalité se dissout dans l’euphorie.

Un état hallucinatoire

Le regard se voile, l’ouïe devient sélective, nous ne voyons ou n’entendons que ce qui répond à nos attentes conscientes ou inconscientes. « On ne voit de l’autre que ce que l’on projette sur lui, c’est la base même de la passion, de l’état amoureux, avance le psychiatre et psychothérapeute François-Xavier Poudat.
Nous minimisons ses défauts, nous modifions notre propre comportement, nous n’hésitons pas à tricher sur nos goûts pour intéresser l’autre davantage. C’est le temps du mensonge et personne n’y échappe. » Et selon Jean-Pierre Winter, psychanalyste, le mot « idéaliser » est encore trop faible pour exprimer le regard amoureux : « Il s’agit de rêve, au sens freudien du terme. Freud définit le rêve comme la réalisation d’un désir, et dans ce rêve, l’être aimé comble nos attentes, nos désirs et nos besoins. »
L’état amoureux est un état hallucinatoire qui nous invite à décrocher temporairement de la pesanteur du réel… C’est un authentique état modifié de conscience : pour celui qui l’aime, l’être le plus anodin se transforme en héros magnifique.
Alors que nous avons vécu sans lui plusieurs décennies, en quelques heures ou quelques jours, il nous est devenu indispensable. Et pour prolonger le rêve, toute constatation susceptible de mettre en cause la perfection de l’aimé est immédiatement refoulée, les mises en garde de l’entourage sont taxées de calomnies, de jalousies…
Les personnes dotées d’une faible estime de soi sont spécialement douées pour ce processus d’idéalisation. Freud évoquait en son temps ces femmes fragiles qui changent de personnalité, de centres d’intérêt à chaque nouveau partenaire, certaines de s’être enfin trouvées.

Le fantasme de ne faire qu’un

Il y a aussi dans l’état amoureux une force obscure qui pousse au dévoilement total, à la mise à nu. L’autre ne doit rien ignorer de moi et je dois tout savoir de lui. C’est le fantasme de la fusion : en amour, un plus un égale un ! En l’autre, je retrouve ma partie manquante.
Le sexe donne à ce fantasme une consistance toute particulière. Pour des raisons anatomiques évidentes, le coït nous amène effectivement à ne faire qu’un, éliminant, ne serait-ce que temporairement, la sensation d’incomplétude qui si souvent nous étreint. La puissance de ce fantasme fusionnel au cœur de la sexualité conduit parfois à censurer nos désirs réels au profit de scénarios qui plaisent surtout à l’aimé.
D’où « ces femmes qui, par amour, acceptent l’échangisme, explique le sexothérapeute et psychothérapeute Alain Héril, ces couples qui glissent dans les relations sadomasochistes que seul l’un des deux désire. Ce sont aussi des mots, des positions ou des caresses que l’on n’accepte que pour garder l’autre ».
Mais ce qui nous attache le plus, c’est la révélation d’un plaisir inouï, inconnu auparavant, qui installe l’aimé en position d’inégalable maître en érotisme. Difficile alors de s’affranchir d’une emprise aussi délicieusement puissante.

Tout est possible

L’amour est la répétition de nos premiers émois d’enfants, pourtant nous ne nous y habituons jamais. Chaque fois, c’est comme si c’était la première. Ou la vraie, la bonne, celle qui nous donne envie de repartir de zéro, de tout recommencer.
Quitter son conjoint du jour au lendemain pour quelqu’un rencontré la veille, démissionner pour ouvrir avec lui une maison d’hôtes dans les Ardennes, claquer ses économies pour s’offrir ensemble un tour du monde en voilier… Nous le ferions sans hésiter ! Les conséquences ? On verra bien.
L’exaltation amoureuse procure une sensation d’invulnérabilité. Ocytocine, quand tu nous tiens, la raison nous fuit. « Amoureux, on ne se soucie que de l’intensité de l’émotion, confirme Marie-Laure Colonna, comme si sa force était la preuve de son authenticité. » Or la décision radicale de tout quitter par amour peut simplement traduire le désir inconscient de se fuir, de fuir ses responsabilités. Je me jette alors dans l’amour comme certains sombrent dans le sommeil. Rien de très glorieux… mais si l’amour cessait de nous aveugler, serait-il encore l’amour ?

De la passion à la durée

La passion et l’état de transe qu’elle génère sont éphémères. Quels sont les ingrédients indispensables pour qu’un couple dure ? Réponse en six points.
Un besoin d’appartenance : « Nous ne désirons pas créer un couple durable pour des raisons sentimentales, mais à cause d’un besoin d’appartenance », assure Robert Neuburger, psychanalyste et thérapeute de couple. Autrement dit, c’est parce que nous traversons un moment de questionnement durant lequel notre sentiment d’appartenir à un groupe est flou que nous aurons envie de vivre en couple.
Un mythe commun : il y avait une nécessité à cette histoire, se disent les couples qui durent. D’où la recherche de preuves qu’ils sont faits l’un pour l’autre – goût commun pour le cinéma, la littérature, la musique… « Sans ces mythes fondateurs, pas de couple possible », affirme Robert Neuburger.
- Des rituels particuliers : les habitudes permettent au couple de s’installer dans une intimité qui le distingue des autres. Ce sera « leur » restaurant du samedi, le cinéma le dimanche, les vacances à Cavaillon…
- La reconnaissance du social : la passion se passe aisément du reste du monde, pas le couple constitué. La première preuve d’engagement consiste à présenter le partenaire aux autres : famille, amis, collègues.
Le souci de l’autre : chacun des partenaires du couple doit lutter contre son narcissisme et s’intéresser réellement au cheminement de l’autre, à son évolution, à ses aspirations.
Le soin de l’autre : dans l’amour naissant, la question de savoir si l’autre est bien ne se pose pas. Dans le couple constitué, en revanche, il faut être attentif aux signes de malaise. S’installer dans la durée, c’est passer de « On est bien » à « Est-ce que tu vas bien ? »

Les idées clé du jeu de l'amour

  • Jeux d’hormones
    Libérées au moment de la rencontre, elles nous font planer, désirer, jouir, oser. Et nous rendent dépendants à l’autre.
  • Jeux de mémoire
    Amoureux, nous vivons une forme de régression qui réactive – ou répare – le premier lien affectif fusionnel (avec la mère).
  • Jeux de dupe
    Exaltés, nous ne voyons de l’autre que ce que nous projetons sur lui. Mais gare à l’aveuglement.